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Le style dans The Crown: analyse des tenues du Duc de Windsor, du Prince Charles, du Prince Philippe et de Louis Mountbatten (+ la sélection Royal Warrant)

Ca faisait un petit moment que je n’avais pas proposé d’analyses de style. Vous aviez beaucoup apprécié ce que nos précédentes analyses sur James Bond, Suits, mais aussi Peaky Blinders ou Kingsman.

Vous allez vraiment finir par croire qu’on ne jure que par les séries britanniques car j’ai voulu ici vous livrer une analyse des styles masculins dans The Crown. Je le fais avec un peu de retard, mais ça prend forcément du temps de digérer et retranscrire 4 saisons 🙂

J’ai longuement hésité à faire un parallèle entre fiction et réalité, mais ça aurait fait perdre en clarté l’article et donner un côté presse people dont on pourra bien se passer. L’analyse sera donc effectuée strictement sur les tenues de la série, et non pas les équivalents de la réalité.

Va -t’on parler de tous les personnages de la série ?

On va aborder en particulier les personnages masculins les plus présents et les plus marquants de la série: le Duc de Windsor, le Prince Charles, son père le Prince Philippe, duc d’Edimbourg et son oncle Louis Mountbatten.

Je remettrai à jour cet article plus tard avec quelques personnages secondaires, dont j’ai trouvé certaines tenues particulièrement intéressantes.

Je vais enfin vous préparer une sélection en fin d’article, et je me suis dis que c’était intéressant d’aller à fond dans le thème: c’est pourquoi vous trouverez une sélection exclusivement Royal Warrant, et une seconde sélection plus généraliste.

Qu’est ce que le Royal Warrant ? Il s’agit des mandats délivrés par la Couronne britannique aux entreprises qui fournissent ses membres.

 

Je le précise à toutes fins utiles, mais vous vous ferez spoiler en lisant cet article (de la même manière qu’en lisant un article wikipedia, voire même un livre d’histoire)

Le duc de Windsor

Edward VIII est probablement l’une des figures majeures de l’élégance telle qu’on l’envisage aujourd’hui. Précisons toutefois qu’il s’agit surtout d’une élégance vestimentaire, beaucoup moins morale du fait notamment de ses sympathies avec le régime Nazi.
L’idée n’étant cependant pas de vous faire sa biographie, mais plutôt d’analyser son style, je vous recommande chaudement de lire ce billet du fameux blog Le Paradigme de l’Elegance qui vous en livre un résumé concis.

Je commence avec lui, mais théoriquement il aurait été plus logique de le placer à la toute fin ? Pourquoi ? Car ses tenues sont autrement plus subtiles que celles des autres protagonistes (on pouvait s’y attendre)  qui paraissent à côté relativement fades, voire parfois grossières.

J’ai choisi de ne pas spécialement traiter les derniers jours du duc de Windsor, hormis ce costume

Lord Mountbatten

Sûrement le personnage dont l’évolution est la plus surprenante avec le changement d’acteurs: on le connaît comme un mentor bienveillant auprès du Prince Charles, et de son père Philippe. Avec l’affectueux surnom d' »oncle Dickie ».
Il porte ainsi un powersuit avec une belle combinaison de motifs, mais qui ne se détache pas particulièrement de ce qui se faisait à l’époque.

Avec le fast forward de la saison 3, c’est Charles Dance qui l’interprète. La stature du personnage change alors complètement et il est repositionné en tant que chef d’Etat Major de la Défense Nationale dans son contexte d’ancien gouverneur des Indes et de héros de la Seconde Guerre Mondiale (il joue un rôle majeur dans le Débarquement). C’est en potentiel leader du gouvernement qu’on le présente lorsque l’homme d’affaires Cecil King l’approche.

On se rapprocherait presque du rôle de Tywin Lannister pour lequel on connaissait déjà l’acteur.

La figure de Lord Mountbatten devient dans la troisième saison plus affirmée, autoritaire et plus austère. On le voit bien à travers les tenues au style beaucoup plus sobre mais toujours aussi directif avec des revers de costume et des cols de chemise larges.

Beaucoup moins de fioriture sur les motifs, exceptés évidemment la Regimental Tie (rappelons que Lord Mountbatten fût First Sea Lord, le commandant général de la Royal Navy).

J’apprécie en particulier cette cravate jacquard sur un ensemble sobre bleu marine et blanc, où les motifs rouges rajoutent une touche de couleur discrète.

Une combinaison de rayures très formelle entre le costume et la Regimental Tie: ici la chemise blanche permet une transition sobre entre ces deux motifs similaires (aucun problèmes pour combiner les rayures tant qu’on varie sur les couleurs et les dimensions, ce qui est très largement le cas ici).

Le prince Charles

Evidemment, nous allons analyser le style du Prince Charles uniquement dans les saisons 3 et 4, qui marquent les débuts de sa vie de jeune adulte.

Ce qui est particulièrement intéressant, c’est la manière dont les tenues vont le vieillir et lui donner du caractère: de sa période d’études du Gallois pour donner son discours de Prince de Galles jusqu’au mariage tumultueux avec Lady Diana.

Les revers de ses costumes s’élargissent littéralement au fur et à mesure qu’il impose ses propres choix et qu’il cherche à s’émanciper du carcan familial et des contraintes royales.

Saison 1&2

Ainsi, le style est au départ soigné sur les mélanges de motifs: en revanche les proportions sont plus discrètes sur ces costumes trois boutons avec revers plutôt fins.

La chemise bleue claire ici est une transition intelligente entre la veste et la cravate à motifs: c’est une bonne alternative à la chemise blanche qui peut apparaître comme trop lisse et formelle, ou à la chemise blanche à rayures bleu marine qui peut faire trop bureau.
C’est à mon sens une version plus habillée de la chemise Tattersall qu’on va voir plus bas.

On note enfin d’autres compositions beaucoup plus classiques, avec tout de même un effort sur les proportions (revers et col de chemise) ainsi que sur la texture de la cravate:

Saison 3&4

Une fois ses quartiers pris à Highgrove, on constate une nette évolution: c’est le début des costumes croisés avec des revers généreux.

Dans l’épisode où le Prince Charles crève l’abcès sur l’échec de son mariage, la tenue est beaucoup plus conservatrice et austère: d’abord chemise blanche, cravate bleu nuit à pois et costume bleu marine à rayures.

Puis costume bleu marine croisé, cravate à pois verte et bordeaux et chemise blanche.

Tout comme pour Louis Mountbatten, plus les évènements autour du personnages prennent de l’ampleur, plus les tenues deviennent sévères.

Petit aparté toutefois sur cette tenue estivale avec costume crème en coton que les puristes apprécieront. Avec encore une fois une utilisation judicieuse de la chemise bleue claire qui permet une belle transition avec la cravate khaki, sans la formalité d’une chemise blanche.

 

Le prince Philippe

C’est un peu dommage, mais dans le traitement du duc d’Edimbourg, les tenues deviennent moins intéressantes et beaucoup plus attendues au fur et à mesure des saisons. Un peu comme pour rendre faussement actuelle les tenues au fur et à mesure qu’on s’éloigne des années 50 avec notamment des revers plus fins, certes représentatifs d’une époque qui changent mais qui plairont forcément moins aux puristes parmi vous.

Au début: des textures et des motifs assez surprenants. Par exemple ces micro-rayures:

La tenue suivante est un peu moins réussie puisqu’elle respecte moins les règles classiques de contraste peau/cheveux, avec un contraste trop marqué entre la chemise blanche et le costume bleu marine:

Ou ici ce micro-motif carreaux légèrement texturé: il est ici bien mis en valeur grâce à la sobriété du reste de la tenue (chemise blanche et pochette blanche).

Saison 3&4

On retrouve certaines combinaisons de motifs intéressantes: ici tattersall et Prince de Galles.

D’autres tenues sont des grands classiques du genre (blazer bleu marine + pantalon gris et chemise blanche ou bleu clair) mais sont moins adaptées à sa carnation:

C’est flagrant sur cette tenue où le regard se dirige naturellement vers le noeud de cravate qui est là où il y a le plus de contrastes dans la tenue. Le visage est du coup en retrait.

Le style Gentleman Farmer de Balmoral, l’apparence du pouvoir symbolique

On le retrouve en particulier sur le Prince Charles et sur le Prince Philippe, mais il reste assez similaire entre ces deux personnages.
C’est un style tellement particulier avec un uniforme très spécifique et défini qui méritait une catégorie à part: on le retrouve en particulier dans les épisodes qui ont lieu au chateau de Balmoral.

Cette scène ne se passe pas à Balmoral mais elle présente une déclinaison intéressante et plus habillée de ce style chasse: avec une veste en tweed trois boutons (probablement pas une Norfolk qui ne se porte pas sous une Barbour).

Ici, la variation avec pull col V, chemise Tattersall et cravate à motifs: le tout restant dans des tons terre/khaki.

Ces couleurs typiques du style Gentleman Farmer s’expliquent par les contraintes de la chasse, en particulier ne pas effrayer le gibier et donc se fondre dans la nature.

Focus sur les chemises Tattersall

Il ne s’agit pas de simples chemises à carreaux mais de chemises tattersall. Le nom vient du marché aux cheveux londonien fondé par Richard Tattersall: les cheveux y portaient une couverture avec fond crème et fins carreaux noir et rouge.
On l’utilise ensuite pour confectionner les gilets de chasse, puis pour les toutes premières chemises, à l’époque où il s’agissait encore d’un sous vêtement qu’on ne montrait pas.
Ce qui est assez amusant d’ailleurs puisque dans la série, cette chemise est systématiquement portée sous un pull col rond ou col V.

L’épreuve de Balmoral

L’épisode « L’épreuve de Balmoral » est d’ailleurs représentatif des contraintes du lieu: une tenue Gentleman Farmer recquise pour chasser dans de bonnes conditions, en particulier des bottes robustes et qui isolent bien pour se déplacer dans les pâturages forcément humides et boueux, mais qui reste aussi soigné en intérieur (sans forcément aller dans un formal black tie).

Cette épreuve est forcément faite pour avantager la noblesse plus habituée à mélanger l’outdoor et l’habillé qu’une bourgeoisie plus citadine: c’est bien ce qu’on voit dans l’épisode où le contraste est flagrant entre Lady Diana et Margaret Thatcher.

Probablement la meilleure illustration possible quand on parle d’overdressed

On voit une opposition marquée entre une noblesse née avec le pouvoir et l’argent, et donc avec du temps à consacrer aux loisirs (notamment à la chasse à courre et l’équitation, des loisirs pas vraiment accessibles à tous) et Thatcher, née d’une famille ouvrière, et dont les priorités sont forcément plus professionnelles que dédiées au loisir.

C’est sûrement l’épisode où les vêtements sont la meilleure démonstration du pouvoir symbolique de la famille royale.

Les noeuds de cravate: four in hand et aucun Windsor

Entre la dynastie Windsor et le noeud de cravate Windsor, le raccourci est facile. Celui-ci n’est en réalité porté par aucun des hommes qui privilégient un noeud simple four-in-hand: un noeud beaucoup plus fin et sophistiqué que le Windsor un peu trop grossier.
Il a également juste ce qu’il faut d’irrégularité en terme de goutte et de forme pour ne pas avoir l’air trop austère.

II La sélection Royal Warrant

J’avais hésité à vous proposer une sélection par personnage, voire par tenue Mais les pièces et les styles restent au final assez similaires pour vous concocter une sélection globale sur la série.
Vu que l’objectif même d’une sélection est de faire le tri, j’ai choisi de vous présenter une seule marque par catégorie.

Avec quelques exceptions, je vais vous présenter des marques qui ont reçu le Triple Warrant: celui de la Reine, du duc d’Edinburgh et du Prince de Galles.

Outdoor: Barbour

C’est sûrement une des vestes les plus vues à l’écran, voire la plus vue lors des épisodes à Balmoral. Elle reçoit d’ailleurs son premier Royal Warrant du Prince Phillips en 1974, cinq ans avant que Thatcher soit élue (et donc environ 5 ans avant les évènements représentés dans l’épisode « Balmoral Test »). Elle reçoit ensuite son second en 1982 des mains de la Reine Elizabeth, et son troisième du Prince Charles en 1987.

Souliers: Crockett&Jones

Crockett&Jones possède un Royal Warrant octroyé par le Prince Charles en xxx, j’ai choisi cette maison plutôt que les autres pour la variété impressionnante de son parc de formes qui va de la boots increvable jusqu’à la fine richelieu à la forme ultra racée.

Robes de cérémonie Ede & Ravencroft

Ede & Ravenscroft pour tout le cérémonial réalisé pour la Couronne depuis 330 ans. Elle confectionne plus globalement les robes de cérémonie pour la noblesse.
Bien entendu, il s’agit ici plus d’une mention anecdotique que d’un conseil de style à proprement parler 🙂

Costumes Gieves&Hawkes

Située au n°1 de Savile Row, il s’agit d’un des tailleurs principaux du Prince Charles: il au départ de deux maisons distinctes. Gieves étant un des principaux fournisseurs de la Royal Navy britannique et Hawkes de l’armée. Hawkes reçoit son premier Royal Warrant en 1799.
Les deux maisons fusionnent ensuite en 1974.

Chemises: Turnbull&Asser

L’enseigne a reçu un Royal Warrant du Prince de Galles (il s’agissait d’un de ses tous premiers): elle a été fondée en 1885 et est notamment connue pour habiller James Bond, ou encore Gatsby dans The Great Gatsby (la version avec Robert Redford).

Mailles: Johnston of Elgin

La référence du cachemire écossais dont nous avions parlée en 2019 et dont nous avons eu le privilège de visiter: au départ un atelier vieux de 150 ans, qui a tout été le tout premier fournisseur de Burberry.
Si l’usine est une institution, la marque en propre est quant à elle assez récente: elle reçoit ainsi son Royal Warrant du Prince de Galles en 2013.
Pour vous donner une idée de l’importance de cette maison dans le folklore britannique, c’est elle qui possède et référence tous les tweeds d’Ecosse et les domaines correspondants, un peu à la manière d’un cadastre. Ce livre sur le sujet est passionnant:

 

III La sélection généraliste (et adaptée à une vie normale)

Outdoor: En termes de veste waxées, Barbour fait parfaitement l’affaire (et ce n’est pas comme si on devait aller chasser dans des paturages avec l’humidité écossaise tous les jours), je voulais donc plutôt élargir la sélection à d’autres vestes similaires. Le genre de vestes utilitaires mais qui se portent bien par dessus un costume.
J’ai justement pu tester récemment la Jungle Jacket de chez Yeossal (que j’aime beaucoup pour ses poches en biais avec plis creux), une belle pièce accessible. Et, dans une version plus premium du fait de sa confection Napolitaine, la Safari Jacket de chez Besnard.

Les deux possèdent un bon côté Gentleman Farmer: la première grâce à son tweed Donegal, la seconde grâce à son motif Prince de Galles.

Souliers: Je vous aurais aussi évoqué Crockett&Jones dans l’idéal, voire Alfred Sargent (dont l’usine a malheureusement fermé ses portes). J’avais testé en Novembre dernier les bottines Moissac Septième Largeur en cuir grainé et avec cousu Storm Welt: probablement le modèle qui pourrait le plus se rapprocher des Conniston.

Pour des souliers de chasse à proprement parler, Hardrige propose de très beaux souliers demi-chasse cousu Norvégien avec la semelle la plus légère que j’ai pu voir jusqu’à présent:

Costumes: En petite mesure italienne, forcément le trio Jean-Manuel Moreau, l’Officine et Clotilde Ranno.
Jean-Manuel Moreau a d’ailleurs publiée une photo d’un somptueux blazer croisé d’un client qui n’est pas sans rappeler une des tenues du duc d’Edinbourgh

En plus accessible, j’avais sinon testé un costume au style très anglais chez Scavini:

Chemises: Sans contestes les chemises Hast pour la diversité des motifs proposés (ainsi que l’apparition tant attendue des grands cols). Et pour la diversité des cols (notamment les tab collar et pin collar), je peux vous recommander The Nines.

Avec une confection plus haut de gamme, les chemises Claude CCF sont enfin un excellent choix pour des cols ultra-travaillés

 

 

 

 

 

Valery

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