Disclaimer: nous avions en 2019 organisé un pop-up store de ventes de cravates vintage, pour la plupart confectionnées au Japon. Aujourd’hui, je vous propose une nouvelle série de 150 cravates, qui vont être mises en ligne au fur et à mesure des prochaines semaines.
J’en profite ainsi pour remettre à jour cet article de conseil rédigé par Gustave en 2019, avec beaucoup de nouveaux visuels: on va surtout mettre l’accent sur les combinaisons costume/chemise/cravate qui marchent avec des motifs vintage beaucoup plus affirmés.
Les différences vont peut être vous paraître un peu minime, mais j’ai du coup tout de même indiqué les fautes de goût les plus évidentes. Vous allez voir: tout dépend surtout du registre des vêtements portés. Lorsque ceux-ci ont un registre trop différent, vous sentirez instinctivement que quelque chose ne va pas, mais vous ne saurez pas forcément le désigner.
C’est une compétence qui vient avec le temps, et surtout au fur et à mesure que l’on s’intéresse aux vêtements et à leur histoire (et aussi que l’on apprend à reconnaître les belles matières et les motifs bien faits).
Cette partie est assez longue, mais c’est justement car j’ai voulu varier le plus possible les exemples: « practice makes perfect« , c’est en intégrant beaucoup d’exemples que vous assimilerez les petites règles implicites, parfois compliquées à mettre sur papier.
Et pour justement vous mettre à la pratique, vous pouvez gagner un lot de cravates Monsieur London, Atelier Particulier et colorblind grâce au concours JamaisVulgaire, qui se termine lundi 30 Mars.
Sommaire
I Les cravates à pois
a Non
Les deux photos qui suivent ont eut un joli succès sur Pinterest, sans doute car elles rappellent vaguement l’univers financiers et qu’elle ont pu inspirer les apprentis Gordon Gekkos qui maîtrisent peu les codes du formel.
Ce qui choque d’abord l’oeil, c’est le tombé désastreux de la cravate qui semble plus ou moins fourrée à l’arrache dans la veste. Le noeud cravate de cravate remplit quant à lui relativement mal le col cutaway, très très ouvert. La pochette n’est pas en reste: vous n’êtes pas censés la plier impeccablement non plus, mais rajouté au reste ça ne passe pas du tout.
Ensuite le mannequin ici est relativement costaud, il n’était du coup pas forcément nécessaire de rajouter les rayures horizontales et le col cutaway pour accentuer l’effet.
Une cravate unie en soie simple aurait été préférable pour atténuer cette tenue déjà chargée.
Enfin cette composition fait très (trop) costume de financier (col contrastant blanc, rayure bleu marine) et appelle donc à des matières plus nobles et un arrangement plus soigné pour être un peu plus crédible
C’est à peu près le même souci ici: un noeud qui ne remplit pas du tout le col cutaway ultra large. Vous avez aussi un parfait exemple de rappel de couleurs excessifs sur un costume: on a exactement les mêmes nuances de bleu sur les rayures de la chemise, les pois de la cravate et les carreaux du costume.
Le motif des rayures de la chemise est ultra chargé et grossier, de même que celui des pois de la cravate (surtout à cause du contraste entre un bleu trop clair et du noir en fond). Cette chemise rappelle encore un univers financier, qui ne colle pas du tout avec les carreaux du costume (qui font penser à un Prince de Galles pas très réussi).
b Oui
Voici une première tenue bien moins prétentieuse, avec une cravate en grenadine de soie (ça se voit à la légère texture proche du nid d’abeille). Cette photo est un très bel exemple d’équilibre des matières: la grenadine de soie est une texture un peu travaillée qui ne semble pas trop lisse par rapport à la veste de costume Prince de Galles légèrement country.
Les rayures de la chemise elles aussi sont assez épaisses et ne semblent pas donc formelles. Si le bleu des rayures de la chemise et des carreaux est à peu près identique, celui de la cravate est quant à lui plus électrique et plus profond.
Sur une tenue un peu country comme celle là, il aurait été vulgaire de chercher un accord parfait des couleurs.
On va ici un peu plus loin dans le décontracté avec un costume tweed à chevrons beige simplement agrémenté d’une pochette. Cette mise peut sembler très habillée à cause de la boutonnière sur le revers mais elle est portée très simplement avec une chemise oxford à col boutonné. Evidemment, on ne cherchera pas à accorder la couleur de la cravate à celle de la boutonnière. Et le blanc de la pochette posée négligemment aura un mini rappel bien suffisant avec celui des pois de la cravate.
Cet assemblage est beaucoup plus formel, et est une version bien améliorée des deux tenues de financiers ratés de la première partie: les rayures de la chemise sont beaucoup plus sobres (et on échappe au col blanc contrastant si cliché, même s’il n’aurait ici pas foncièrement dégradé la tenue). La veste est de bien meilleure qualité et le pliage carré de la pochette est soigné. Le noeud remplit quant à lui bien plus le col cutaway.
On voit aussi qu’on a une belle veste trois boutons dont le bouton du haut se cache facilement sous les revers
Alors certes, l’ensemble est beaucoup plus austère, mais c’est exactement ce que devrait être votre objectif si vous voulez une tenue formelle sans aucun risque de faute de goût.
On arrive ici sur le mélange le plus subtil avec une cravate à pois rouge orangée habilement associée à une laine mouchetée country entre beige et marron clair.
La cravate semble un peu trop habillée par rapport à la veste: c’est bien pour ça que la chemise très classique avec des rayures formelles fines forme une habile transition. Bref, un bel ensemble que j’ai surtout retenu pour ses couleurs.
II Le motif paisley
a Non
Contraste blanc/violet/noir trop vulgaire, et aussi et surtout l’assortiment horrible cravate/pochette/boutons de manchettes. Rien ne dira mieux que cette tenue « Je suis plein de bonnes intentions mais je ne sais vraiment pas m’y prendre ».
Le Paisley a surtout été porté par le fils de bonne famille, d’abord en Angleterre mais aussi dans les familles de l’Ivy League. C’était une des rares cravates dont le motif était considéré comme fantaisiste mais acceptable dans un cadre décontracté. On voit bien ici qu’avec cette chemise financier, cette pochette exhubérante et cette pince à cravate, on en est bien loin. Ce qui me perturbe le plus dans cette mise, c’est surtout la largeur de la cravate par rapport à celle des revers.
Et c’est aussi à quel point à part la cravate, le reste de la tenue est pauvre et rien ne lui fait vraiment écho: on ne voit vraiment qu’elle alors qu’on sent bien qu’elle n’y est pas du tout à sa place.
Ici, c’est surtout l’assemblage entre la chemise Vichy et la cravate Paisley qui me dérange. Le résultat est trop chargé et la chemise Vichy trop en décalage avec le reste de la tenue bien plus formel.
Le noeud est peu adapté au col, et surtout les couleurs sont pauvres. On ne voit que la cravate et la pochette par dessus la chemise blanche et la veste noir. Il aurait au moins fallut ici une chemise bleu clair et une veste bleu marine.
b Oui
C’est d’abord le motif rare de cette cravate qui m’a attiré, qui n’est pas un Paisley même si la géométrie n’en est pas si loin. On a ici un parfait exemple d’équilibre sur la luminosité des matières et sur l’assortiment cravate et pochette: celles-ci prennent la lumière de la même manière et ont un côté doré assez similaire. Le tout est impeccablement calmé par une veste sobre et une chemise aux rayures un peu épaisses (donc légèrement moins formelles) mais à la couleur légère.
Une cravate Paisley plus classique et surtout plus mat, qui s’accorde bien avec une veste à chevrons et une chemise oxford à col boutonné. Une tenue casual à mi-chemin entre l’Ivy League et le Gentleman Farmer mais qui respecte au moins bien les règles basiques de proportions et dont les couleurs sont bien dosées (la cravate et la pochette ressortent bien, mais sans pour autant éclipser la veste et la chemise).
Même chose sur cette photo, mais avec cette fois-ci un motif Prince de Galles sur la veste.
Deuxième type de motif Paisley: un peu plus petit et plus conventionnel, il se porte de la même manière que son homologue au motif plus marqué. La composition est ici impeccable au niveau des motifs: chemise à rayures, veste Prince de Galles, pochette à pois avec couleur simple et liseré bleu clair.
Cette dernière mise est plus formelle, mais fait intervenir des rayures classiques et peu ostentatoires, et une flanelle de laine de qualité sur le costume.
III Les cravates à rayures
a Non
Cette image se passe de commentaires: la veste aurait été déjà compliquée à porter seule, alors la cravate n’arrange vraiment pas du tout les choses.
Cravate fine et revers fins mais col de chemise beaucoup trop large et veste mal coupée: j’éviterais aussi une cravate avec autant de détails (tricot et rayures horizontales) lorsque le reste de la tenue est si basique.
b Oui
Croyez le ou non, mais ce genre de tenue se porte traditionnellement au coin du feu le we en lisant un bon bouquin. La veste et la cravate sont complètement dans ce registre décontracté/habillé, avec des carreaux légèrement bleutés qui rappellent les rayures de la cravate. Le noeud rempli bien la cravate et le contraste de couleurs est bien choisi.
La pochette Paisley apporte une touche plus travaillée, tout en restant dans des tons de couleurs proches.
IV Les cravates unies
a Non
Ici, le noeud n’est pas du tout adapté au col cutaway. La couleur du costume est en plus trop précieuse et avant gardiste pour être portée avec cette cravate en tricot.
Ici, c’est le costume qui est trop lisse en terme de texture pour être porté avec cette cravate. La pochette détonne d’ailleurs trop et ne trouve aucun écho dans le reste de la tenue.
Un rappel vulgaire et trop peu subtil de rouge dans l’ensemble de cette tenue: il aurait fallut jouer davantage sur des nuances, et surtout trouver une veste de costume aux teintes moins neutres.
b Oui
Ces deux cravates Atelier Particulier, la première en laine et cachemire et la seconde en grenadine de soie, sont portées avec des pièces unies, qui jouent beaucoup sur la texture. Pour autant, elles n’éclipsent pas les cravates mais les mettent plutôt en valeur grâce à des couleurs neutres.
Dans la première photo, c’est ce que fait le manteau beige (avec apparemment un joli twill de laine). Et c’est ce que fait le pull col rond gris dans la seconde photo, avec de légères nuances bleutées.
Les cravates en tricot de laine sont elles aussi très casual, c’est bien ce que les deux compères de chez Monsieur London ont comprit, en portant leur cravate avec des vestes très country, en Prince de Galles et en petits carreaux.
Les accessoires sont toujours bien choisis, avec une pochette et une écharpe dont les couleurs contrastent bien avec la cravate.
Petit rappel sur le sujet des couleurs: l’outil colordb est votre ami pour vous aider à bien associer les couleurs, avec une méthode infaillible quasi mathématique. Je vous en avais parlé dans cet article, au tout début du blog.
Cravates unies et vestes en coton
Je n’ai longtemps juré que par les vestes en laine, qui étaient pour moi les plus durables et les plus polyvalentes, et qui pouvaient à mon avis tout aussi bien faire l’affaire pour une tenue de printemps et d’été.
Mais après avoir essayé un peu les vestes en coton au Cambodge, je dois reconnaître qu’elles ont leur avantages: la texture est plus mat et plus brut et le tombé tout aussi bon.
Et surtout, c’est un excellent choix pour porter avec des cravates unies casual, même en tricot:
Elles vont aussi parfaitement avec les cravates en coton, une matière que j’ai trouvé étonnamment intéressante pour le travail des couleurs et de la texture.
Bonjour. Vous avez raison, porter une cravate,
c’est tout un art. Elle représente un peu les talons aiguilles pour une femme
(en beaucoup plus confortable !). P.-S. Je n’aime pas les cravates à
motifs non plus 😉
Voilà un sujet très important auquel beaucoup d’hommes devraient porter attention !