Sur JamaisVulgaire, je vous parle souvent des nouvelles marques qui se sont crées ces dernières années: sans intermédiaires, elles vendent directement sur Internet et cherchent à pratiquer les prix les plus compétitifs possible.
Forcément, le covid-19 et l’Ukraine ont rendu la situation très compliquée pour ces marques.
Leur défi est donc devenu de passer d’une marque utilitaire (on achète pour le rapport qualité/prix du produit) à une marque aspirationelle, qu’on va acheter pour l’univers de marque et car le style nous fait un peu rêver.
Devenir une marque aspirationnelle est donc le nouveau défi de ces DNVB pour surmonter ce climat économique difficile. Et je pense que la marque Hast est en train d’y arriver avec brio avec l’objet de ce test, le costume en velours marron.
Pour rappel, nous avions déjà testé la marque Hast à travers les articles suivant:
Chemises Hast, ou comment faire une chemise de très bonne qualité à 54 euros
TEST HAST, CHEMISE CASUAL ET GAMME PREMIUM : UNE MONTEE EN GAMME VALIDEE
Test&Avis Hast: la nouvelle gamme grands cols
Test&Avis Hast: la valeur sûre des chemises formelles et casuals
Sommaire
I Hast: la collection Automne-Hiver 2022
Hast est pour moi le meilleur exemple de la marque passée d’utilitaire à aspirationelle avec succès, ce qui lui donne pour moi beaucoup de mérite.
En effet, elle se positionne à ses débuts comme une marque de chemises pas chères, au bon rapport qualité/prix: un peu l’équivalent français des classiques britanniques Charles Tyrwhitt ou encore TM Lewin. Une bonne solution pour se fournir en chemises de bureau, assez qualitatives pour tolérer un port intensif mais sur lesquelles on peut aussi se permettre d’avoir une bonne rotation.
La chemise étant considérée par beaucoup d’hommes comme un sous-vêtement, cela faisait d’Hast une DNVB très utilitaire, qui a d’ailleurs eu beaucoup de concurrence sur le créneau de la chemise à 50 euros.
La marque a su cependant évoluer assez rapidement pour se distinguer de la concurrence:
– d’abord grâce à la variété des tailles et des cintrages et la disponibilité de modèles manches extra longues
– ensuite grâce à l’arrivée de la gamme casual (ce qui fait qu’on va venir davantage chez la marque par plaisir et non plus pour la contrainte de s’habiller au bureau) puis avec l’arrivée des modèles haut-de-gamme à 90€ pour démontrer un savoir-faire pointu (7 pts au centimètre, boutons cousus Zampa di Gallina, tissu Thomas Mason etc)
L’arrivée du prêt-à-porter standard s’est appuyée sur des pièces basiques, faciles à vendre comme les chinos. Sans être critiquables, elles n’apportaient pas grand chose sur le marché mais s’adressaient avant tout aux clients Hast pour leur donner l’occasion d’acheter plus chez la même marque des pièces faciles à porter dont on a toujours besoin.
C’était aussi un peu le cas au début sur les vestes de costume, avec des tissus assez classiques et des revers assez fins.
Bref, pas de pièces différenciantes ni de grosses prises de risques, mais cela fait aussi parti d’une stratégie de lancement prudente et raisonnée, où l’on va être plus patient.
C’est sur les 2 dernières années qu’Hast s’est davantage exprimée, à travers des textures, matières et couleurs beaucoup plus marquées.
Elle a aussi su s’adresser aux besoins des plus sartorialistes d’entre nous avec son offre grand col.
1 Pièces favorites et analyse de la collection
On y trouve d’abord de très belles textures: difficile de passer à côté de la variété de textures proposées sur les vestes de travail, et sur certaines vestes sport.
Quelques partis pris assez osés se remarquent comme le pantalon blanc taille haute en velours écru (idéal pour un style sprezzatura hivernal) et surtout la surchemise à carreaux avec des motifs marqués.
Enfin, on remarquera également les nouvelles chemises grand col ainsi que les pulls col polo, parfaits pour une tenue un peu habillée.
2 Identité
Cette année, les costumes ont plus de texture et des revers sont plus imposants. Les couleurs sont aussi plus marquées et on retrouve beaucoup d’accessoires et de traits de styles propres à la nonchalance du style Ivy new-yorkais.
Même si dans la mise en scène, on est encore sur un style assez lisse propre aux DNVB parisiennes, on pourrait pourquoi pas s’imaginer dans quelques années la fantaisie que des marques anglo-saxonnes ont su développer avec le temps comme Drake’s, Castleberry ou encore J.Mueser.
Si Hast continue à travailler son univers de marque et son vestiaire avec autant de régularité que sur les trois dernières années, je la verrais bien s’imposer comme un futur Drake’s français à horizon 3-4 ans.
II Test du costume en velours marron
1 Le tissu
Il s’agit d’un velours milleraies côtelé dont les côtes sont assez épaisses à première vue, lorsqu’on regarde le costume sur le portant. Pourtant, une fois porté, elles restent relativement discrètes et faciles à assumer.
Je les porterai cela dit avec des matières plutôt affirmées en termes de motifs ou de texture: une chemise en popeline de coton blanche toute simple serait un peu trop lisse à côté de cette matière. De la même manière pour des richelieu noires bout droit en cuir lisse.
2 La veste
a Les revers
Ca fait du bien pour du prêt-à-porter à ce prix de ne pas avoir de revers anorexiques comme c’est le cas dans beaucoup d’autres marques sur ce créneau: ici, les revers sont à 8.5 cm.
Pas extra-larges non plus donc mais très respectable pour ce positionnement: il s’agit d’une largeur qui conviendra à la plupart des silhouettes et vous laissera assez libres sur les proportions des cols de chemise et des noeuds de cravate.
b Les finitions.
L’épaule est quant à elle napolitaine, ce qui est assez cohérent avec ce genre de tissu assez lourd, qui a un jolié tombé qui s’exprime bien sur des pièces peu structurées.
Les poches sont droites et à rabat: c’est le choix le plus logique pour un costume en velours, une matière qui fait plus echo au classicisme britannique qu’à la sprezzatura italienne.
De la même manière, la poche poitrine est ici droite, à défaut de la poche barchetta arrondie (qui commence à être vue et revue il faut bien l’avouer)
c Intérieur
L’intérieur est extrêmement classique: une doublure en viscose noire, deux poches poitrine, une poche ticket et une poche téléphone.
d Construction
Sans surprise, on a pour ce prix une construction à plastron flottant: il s’agit d’une évolution de la construction thermocollée classique qui contient plusieurs couches, y compris une toile de crin de cheval. Elle contient en revanche également du thermocollant (qui supporte maintenant mieux les passages au pressing et qui ne bulle pas).
Avec cette construction, on a en revanche pas de revers piqués (on ne trouve pas de toile dans les revers). Cela dit, vu que le tissu est assez lourd, les revers ont déjà naturellement une certaine tenue.
3 Le pantalon
La coupe
Si le pantalon n’arrive pas au nombril, la taille est relativement haute et la coupe n’est pas trop près du corps: sans être un vrai pantalon sartorial taille haute, on arrive tout de même à un résultat satisfaisant puisque le pantalon arrive quasiment au bouton de fermeture de la veste.
On a enfin un peu d’amplitude aux cuisses avec une pince d’une profondeur très correcte.
La seule critique que j’ai concerne l’ouverture à la cheville qui est ici de 16,5. Je trouve ce fuselage un poil exagéré et j’aurais apprécié 18 à 18.5. Un élargissement minime est possible mais, au vu des réserves de tissu disponibles à l’intérieur, qui n’irait pas au-delà de 17.5 (ce qui serait déjà un peu mieux.
Les passants
Même si je préfère habituellement un port sans ceintures avec des ajusteurs latéraux, on a ici des passants fins et longs qui permettent d’accueillir une large variété de ceintures, aussi bien fines (un peu dans le style d’un pantalon Hollywood) que larges (c’est ce qu’on va voir plus bas dans un style à mi-chemin entre le casual chic et le workwear).
Les revers
Les pantalons sont livrés avec le bas fini, et en l’occurence un revers assez généreux de 4.5 cm. C’est le genre de revers que je demande généralement à mon retoucheur mais qui n’est pas forcément proposé automatiquement en prêt-à-porter. Si vous faites une longueur standard, c’est un luxe assez appréciable, sinon ce revers assez large permet de conserver assez de tissu pour avoir de la marge pour ajuster la longueur si besoin.
III Conseils de style
Tenue Ivy
Je vous parlais de Drake’s en première partie de cet article, j’ai donc imaginé une tenue qui reproduise cette nonchalance calculée et qui jongle avec les motifs et les textures.
Une chemise rayée classique aurait été trop austère portée avec ce costume, j’ai donc choisi la chemise Hast grand col à rayures larges et affirmées, évidemment avec le col boutonné négligemment déboutonné.
La cravate Paisley texturée s’introduit bien dans cet imaginaire de tenue Ivy négligée typiquement New-Yorkaise.
J’ai d’ailleurs voulu reprendre l’imaginaire du Drake’s new-yorkais et ses fameuses photos de lookbooks shootées dans des diner hot-dogs à la main en le reproduisant sur une terrasse parisienne avec un plat plus coloré.
Je porte le costume velours marron Hast avec:
– une chemise Hast grand col
– une cravate Etro vintage paisley
– une ceinture Caulaincourt sur-mesure en taurillon nubucké
– des chaussettes Mes Chaussettes Rouges
– des mocassins à pampilles en nubuck Carmina
– lunettes de soleil Carlotti Paris (test ici)
Tenue preppy
Ici, la tenue est beaucoup plus premier degré avec une chemise oxford col boutonné et une cravate rayée vintage: il s’agit d’une interprétation un peu au pied de la lettre du style preppy.
L’oxford est un tissu qui fonctionne bien pour faire echo au velours côtelé car il a assez de texture et de consistance.
Je porte le costume velours marron Hast avec:
– une chemise oxford col boutonné Atelier de la Venise Normande (marque à présent appelée Audemer)
– une cravate vintage club
– une ceinture Caulaincourt sur-mesure en taurillon nubucké
– des chaussettes Mes Chaussettes Rouges
– des mocassins à pampilles en nubuck Carmina
Tenue casual
Dernière tenue beaucoup plus décontractée avec chemise en denim délavée et combat boots casual chic.
Je porte le costume velours marron Hast avec
– une chemise denim délavée Polo Ralph Lauren
– une ceinture tressée en cuir légèrement patiné Anderson’s
– des combat boots l’Homme Inconscient Paire&Fils (lire le test ici)
Conclusion
Autant en termes d’identité de marque que de produits, Hast a accomplit un chemin assez remarquable au bout de 10 ans dont peu de DNVB comparables peuvent se targuer.
Si la marque continue sur cette voie, ce qu’on ne peut que souhaiter, il n’est pas impossible qu’elle devienne à moyen terme une des première vraies marques aspirationnelles françaises issue d’Internet.
Pour en revenir à ce costume en velours marron, vous aurez compris que j’en suis très satisfait, malgré quelques progrès à faire surtout sur la coupe du pantalon: il permet un style affirmé avec un bon rapport qualité/prix pour un budget contenu. Il n’est enfin pas si difficile que ça à assumer, contrairement à ce que la couleur pourrait laisser penser.
Le pantalon est disponible ici à 150€ et la veste est disponible à 265€