On a tous une image un peu faussée du sur-mesure (et de la demi-mesure a fortiori).
Inconsciemment, le mot résonne toujours pour moi avec tailleur un peu snob et showroom feutré.
Ce n’est en fait plus du tout vrai pour l’expérience en boutique, et encore moins pour l’expérience en ligne: c »est en tout cas bien ce que j’ai constaté avec la marque Le Chemiseur.
Je l’avais déjà repérée il y a quelques temps (Novembre dernier) et j’avais été surpris par sa communication et son interaction forte avec l’univers des start-ups et des incubateurs, loin des showrooms et des défilés.
J’étais bien curieux de savoir si, derrière cette approche techno très nouvelle, l’innovation et la qualité étaient bien là.
Sommaire
I Le chemiseur et l’intérêt du sur-mesure
1 Etat de l’industrie et intérêt d’une chemise sur-mesure
L’offre est déjà pléthorique en matière de demi-mesure, voyons ce qu’on nous propose pour l’instant le marché français. Il se distingue d’abord sur la manière de prendre les mesures:
–la machine 3D: apparemment plus un coup de communication qu’autre chose, la rare marque à utiliser les résultats ont des coupes très aléatoires selon les nombreux feedbacks des clients (qu’on trouve notamment sur l’article de BonneGueule à ce sujet)
–la prise de mesure traditionnelle en boutique: elle est précise et effectuée par un personnel formé, il y aura a priori peu d’erreurs ce qui garantit un excellent résultat final. Par contre, ça exclut d’emblée la vente en ligne, et il faut généralement aller à Paris pour profiter des meilleures offres.
–la prise de mesure à domicile, soit-même, mais une fabrication en Chine: le résultat est généralement assez précis (même s’il y a toujours quelques hasards d’appréciation sur la coupe) mais les finitions sont souvent moins qualitatives que ce qui est fabriqué en Europe, en plus d’avoir un tissu très ordinaire. C’est par contre une offre entrée de gamme intéressante: on peut aller voir de ce côté chez Tailor Store
Bref, si je veux rester chez moi pour prendre mes mesures et avoir une chemise à la coupe fiable, avec des finitions soignées (made in Europe voire made in France) et un tissu italien de bonne qualité alors je n’ai a priori pas encore d’offre.
L’intérêt d’une chemise demi-mesure ?
Même les marques de prêt à porter qui proposent des coupes raisonnées et intelligentes ne peuvent pas couvrir les morphologies les plus difficiles, avec souvent des défauts comme des manches trop longues lorsqu’on est petit et fin, un cintrage approximatif quand on est grand et fin, ou une longueur exagérée quand on est musclé et qu’on a un sacré tour de cou.
Les différentes situations (que j’ai d’ailleurs souvent identifiées chez mes clients de coaching) sont résumées avec humour sur le blog de Le Chemiseur.
2 La marque Le Chemiseur
Le fondateur: Jan Schutte
Pour bien comprendre le fonctionnement de Le Chemiseur, résumons d’abord le parcours de son fondateur Jan Schutte en quelques lignes: après sa formation d’ingénieur Centrale Paris-INSEAD, il passe une dizaine d’années comme cadre puis consultant à faire de l’optimisation de process en entreprise, avec une rigueur caractéristique de ses origines allemandes.
Et c’est justement cette démarche rationnelle d’optimisation à tout prix qu’il apporte dans sa marque, d’abord en distribuant exclusivement en ligne, puis en peaufinant le plus possible l’expérience d’achat, du premier pas sur le site jusque la réception finale du produit.
La prise de mesure
Je n’ai honnêtement pas pris les mesures moi-même: tout a été effectué sous mes yeux par Jan lors du Menswear Corner. Ce n’est pas si gênant que ça (sinon je n’aurais pas fait le test) car, même d’un point de vue extérieur, il est évident que la démarche est très simple.
On choisit d’abord sa taille de chemise habituelle: on parle de la taille française, qui se mesure à la largeur du col. (le blog du Chemiseur explique d’ailleurs très bien comment le faire).
Le reste est très simple et consiste simplement à ajuster les différents points d’une chemise à partir de mesures de base: la largeur au torse, à la taille, l’épaule à épaule etc. Tout se fait sur une chemise posée à plat.
Au premier abord, j’aurais jugé ce procédé un peu bancal: quand on ne s’y connait pas vraiment, il est difficile de parfaitement juger de la longueur de la manche, ou de la bonne largeur épaule à épaule.
C’est là que tout le bon sens de la démarche intervient: chacune des mesures est accompagné d’une bonne pratique. C’est à dire un conseil simple et bien illustré pour vous montrer quelle est la mesure qui vous va.
J’apprécie beaucoup ce genre d’initiatives qu’on retrouve rarement, et qui n’est pratiquement jamais exécutée aussi consciencieusement (de manière aussi concrète et avec des photos aussi explicatives). Je vous conseille vivement de faire un tour dans cette partie (que vous achetiez ou pas) qui sera pour vous une mine d’or pour le choix d’une chemise en général.
Le résultat final: un code individuel
C’est une fonctionnalité un peu gadget si vous achetez des chemises juste pour vous (qui est à peu près semblable à un simple compte client), mais bien utile si vous voulez faire des cadeaux.
Le Chemiseur s’est d’ailleurs beaucoup développé durant la période de Noel, où le côté cadeau a été très apprécié.
La clef vous permettra rapidement de retrouver vos mesures et de les modifier.
Le Chemiseur est en tout cas la première marque que je vois à avoir une approche aussi technologique du prêt à porter Made in France, grâce à cette expérience client et ce système de clefs. Vous ne la verrez pas dans des cocktails guindés de la Fashion Week mais plutôt à des évènements typiques des start-ups de la Sillicon Sentier comme les présentations de la Fashion Tech au NUMA (un incubateur parisien).
Cette approche très technologique et typique des start-ups 2.0 est peu orthodoxe et du coup très rafraîchissante: j’espère vivement que d’autres marques innovantes s’engageront dans une telle démarche pour un peu changer de l’éternel cycle de la mode défilés, salons d’acheteurs et showrooms d’agence de presse. Le procédé a d’ailleurs valu à la marque une bourse de la French Tech.
Voici toute la démarche résumée par Jan:
LE CHEMISEUR® from LE CHEMISEUR on Vimeo.
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II Le test
1 Packaging et expérience
Au delà de la qualité du produit, l’expérience client est l’une des grosses promesses de Le Chemiseur, surtout avec son côté cadeau. Je vous ai donc pour une fois pris quelques photos du packaging et du déballage de la chemise. (il paraît que des Youtubeurs gagnent carrément leur vie en publiant des vidéos d' »unpacking », vous y croyez vous ? )
La boîte: du très classique noir vernis, avec une inscription minimaliste.
Un emballage soigné dans du papier de soie
La chemise avec sa carte explicative
2 Les finitions
On est en gros assez loins de finitions ultra sartoriale: on a les coutures anglaises, du 6 points au centimètres, un boutonnage en croix sur pied (mais des boutons en plastiques), des baleines amovibles et un col entoilé, mais pas d’hirondelles ni de dernière boutonnière horizontale.
Pour des chemises Made in France en demi-mesure, qui commencent à 95 euros, c’est très loin d’être un reproche. Il est bien préférable d’avoir un prix accessible, un tissu correct, une bonne coupe et les finitions essentielles plutôt que des boutons en nacre et des hirondelles (qui a honnêtement déjà déchiré sa chemise au niveau des pans ?).
Le col
J’ai opté pour un col français classique, plus allongé et à l’écart moins important: il apporte un peu plus de finesse à mon visage rond qu’un col cutaway classique et est idéal pour une chemise formelle.
On trouve à l’intérieur mes références, et notamment ma clé. Utile si vous voulez vous faire exactement la même chemise que moi. (qui ne le voudrait pas)
(La chemise avait à ce stade là déjà été un peu portée, et pas très bien repassée)
Les poignets
J’ai opté pour un poignet Le Chemiseur, avec un cran assez discret. Je n’avais pas besoin de poignets mousquetaires (trop formels pour mon usage) ni de poignets courts, un peu plus précieux.
Boutons et boutonnières
Les boutonnières sont plutôt propres, et les boutons sont cousus en croix. Seul hic: les boutons sont en plastique et non pas en nacre.
Les épaules
Les coutures sont extrêmement propres à l’épaule, et je crois bien que c’est la seule chemise dont la couture tombe aussi nettement. Rappelez-vous: elle doit être alignée pile poile avec l’os qui forme la pointe, appelé l’acromion.
Le fit général
Cette chemise est sans conteste celle qui me va le mieux à la taille. Elle est même un peu serrée après un bon repas: je rajouterai du coup quelques centimètres à ce niveau là à ma prochaine commande.
Le fit aux épaules est quant à lui assez remarquable, avec un dos en V exemplaire:
Je porte pour l’instant cette chemise de manière plutôt décontractée et estivale. Je ne manquerai pas de faire d’autres photos dans une tenue un peu plus formelle.
Le tissu
Le tissu que j’avais testé était dans une gamme intermédiaire entre la gamme Indispensable et la gamme Eternelle (et ce n’était pas la gamme saisonnière).
Pour une chemise à porter toute l’année, l’idéal est la gamme Eternelle, avec un tissu double retors plus robuste et qui vous tiendra plus chaud l’hiver.
Mais il est compliqué de mettre 150 euros dans une chemise d’une marque inconnue (en plus en achat à distance): je vous conseille donc d’ores et déjà de tester vous-même la qualité du service avec la gamme Indispensable: son tissu simple retors est beaucoup plus léger et sera idéal pour le printemps et l’été.
Le tissu sera forcément pour 95 euros en deça de ce que vous pouvez trouver à un prix similaire dans le prêt à porter, mais n’oubliez pas qu’on est sur de la demi-mesure (donc une coupe parfaite, mais une production en petite quantité) et du Made in France.
(crédits photo: Merci à Jessica Bordeau pour l’ensemble des photos de moi et de la chemise)
Aller plus loin
Vous vous souvenez du concours sur les accessoires ? On va remettre ça avec Le Chemiseur (et deux marques prochainement annoncées) a priori d’ici la fin du mois.
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Merci pour cet article, au top, comme d’habitude!
Petite question: Les tissus subissent-ils un pré-lavage industriel pour éviter tout rétrécissement éventuel lors du premier lavage chez le client. Ça me semble être primordial pour de la demi-mesure.
Même en les lavant à 30° en programme délicat et sans passage au sèche linge, j’ai souvent eu la désagréable surprise de voir rétrécir des pièces, pourtant de qualité, lors du premier passage à la machine…on perd alors tout l’intérêt de la demi-mesure.
Je n’ai pas expérimenté de rétrécissement donc a priori oui. (désolé de la réponse tardive je viens juste de voir la question)
Exact !