Quatrième article de cette série sur l’Arctique ! On vous parle d’une collaboration dont je suis encore extrêmement fier (et je ne pensais à vrai dire pas qu’on pourrait vous parler un jour de marques aussi pointues sur le blog). Il s’agit de Norwegian Rain.
Comme pour les autres marques avec qui on a travaillé sur cette expédition, le cahier des charges était simple : des pièces habillées, qui peuvent facilement se porter en ville, mais aux propriétés techniques exceptionnelles, qui permettent également de tenir dans un climat polaire.
Sommaire
I Norwegian Rain: du projet de thèse à l’innovation
Norwegian Rain débute à Bergen, qui n’est pas vraiment une ville réputée pour son climat facile avec ses 240 jours de pluie par an. Le record ? 85 jours de pluie d’affilée du 29 Octobre 2006 au 21 Janvier 2007. En voyant ça, on ose tout de suite moins se plaindre du temps maussade à Paris 🙂
Les locaux ont donc développé une vraie expertise pour les vêtements techniques de pluie, mais sans jamais vraiment réussir à s’exporter. En grande partie à cause d’un parti pris beaucoup trop utilitaire pour pouvoir se porter dans des villes au climat plus tempéré.
Après un échange à la Bocconi Univeristy de Milan (et du coup une belle immersion dans l’univers sartorial italien), Alexander Helle décide d’aborder autrement le problème en travaillant sur une idée de business de manteaux de pluie adaptés à la ville. Il en fait même une thèse soumise à la Norwegian School of Economics.
Afin de donner naissance à ce projet, il approche le tailleur de Bergen T-Michael qui lui apporte une expertise esthétique et technique grâce à ses 17 ans d’expérience.
La collaboration ne fût pas évidente dès le début : T-Michael, comme de nombreux tailleurs, était habitué à travailler avec des matières naturelles. Confectionner des pièces à manche faites uniquement de matières techniques sonnait au début comme une hérésie.
Le fruit de leur collaboration fonctionne plutôt bien, et se vend dans les grandes villes. En particulier à Londres, qui est loin d’être épargnée par la pluie et qui apprécie le minimalisme chic de pièces comme le Single Breasted, mais aussi au Japon dont la clientèle est tout de suite séduite par la qualité des finitions.
Ainsi grâce à ce succès, Norwegian Rain a pu ouvrir une magnifique boutique (probablement une des plus belles boutiques que j’ai pu voir) à Paris, dans la ruelle Sourdis (une ruelle perpendiculaire à la rue Pastourelle en plein cœur du marais).
On y trouve aussi la collection de T.Michael, composée de costumes et de kimonos (qu’il porte avec un naturel déconcertant).
La collection
Parmi les pièces iconiques, on recense notamment le Single Breasted et le Genève, qui se portent assez près du corps et qui sont bien adaptés à la ville.
On trouve parmi les modèles plus utilitaires notamment le M65, le M85 et le Raincho.
Enfin, le Rive Gauche propose un mélange efficace entre silhouette goth-ninja avec la fermeture asymétrique à l’avant et style tailleur avec le large plis à l’arrière.
Pas étonnant quand on sait que Norwegian Rain a notamment collaboré avec le designer japonais Miharayasuhiro, dont le travail sur les silhouettes est exemplaire (je le suivais attentivement il y a une bonne dizaine d’années).
L’idée reste de proposer des modèles et une collection globalement intemporelle, vous verrez donc peu de nouvelles pièces chaque année. La philosophie de la marque se concentre plutôt sur l’amélioration de ses produits existants.
La technologie
Comme vous le verrez dans le test, Norwegian Rain réussit l’exploit de proposer des manteaux fins mais qui tiennent extrêmement chaud. Le tout grâce à une superposition technique de trois couches:
– une couche extérieure déperlante et coupe vent
– une membrane imperméable
– une doublure respirable
II Test de la parka Moscow
Ce qui m’a surprit dès l’essayage dans le magasin, c’est la finesse du manteau. Je dois vous avouer que j’ai été très sceptique quand on m’a annoncé qu’elle pouvait se porter jusqu’à -20 degrés.
On a juste l’impression de porter un manteau très légèrement matelassé, qui peut éventuellement tenir chaud jusqu’au 5 degrés, mais certainement pas une pièce technique qu’on porterait au dessus d’un cercle polaire.
Le tissu
L’identité sartoriale insufflée par T-Michael se retrouve également à travers la sélection de tissus pour les manteaux, qui sont globalement ce qu’on pourrait trouver si on réalisait un manteau sur-mesure chez un tailleur.
Sur le modèle que j’ai retenu, on a à la fois une couleur originale (un bordeau vif et noble à la fois) avec un chevron très affirmé. C’est typiquement le genre de tissu qui fait davantage penser à une pièce habillée, aux accents un peu Gentleman Farmer qu’à un manteau ultra-technique.
Et le plus surprenant dans tout ça, c’est qu’on a pas du tout l’impression d’avoir à faire à une matière synthétique avec autant de propriétés. Alors qu’il s’agit en fait de polyester recyclé.
Je vous vois déjà vous braquer à la lecture de « polyester », mais le tissu est bien plus unique qu’il n’y paraît.
Le cahier des charges d’Alexander Helle était ultra-exigeant. Il fallait un tissu qui soit l’un des plus respirables et imperméables du marché, mais qui ne ressemble pas à un tissu technique ET qui soit aussi eco-friendly. Un mélange de critère au premier abord contradictoire et compliqué à concilier, mais qui fut trouvé après des mois de recherches chez un fabricant japonais ultra-pointu.
Le rembourrage
Concilier un manteau fin et des performances techniques de pointe a été rendu possible par les recherches de la marque menées en Suisse, qui permettent de remplacer le matelassage classique en matière synthétique par des fibres de laine.
Cette finesse permet un vrai beau tombé, similaire à celui d’un manteau de ville, sans avoir l’effet « Mr Bibendum » qu’on pourrait trouver sur les doudounes et autres parkas habituelles.
Autre avantage du rembourrage, typique d’une vraie parka haut de gamme. Il est présent sur toute la longueur du manteau (qui descend tout de même jusqu’aux genoux) là où sur d’autres modèles milieu de gamme il s’arrêtera au niveau de la taille.
Le manteau est également partiellement doublé en peau de mouton islandais (difficile de faire plus chaud).
S’il reste très fin, il est en revanche assez lourd, contrairement aux parkas aux rembourrages synthétiques (Primaloft, Climashield etc)
Derrière ce manteau assez fin, l’idée est aussi de permettre une vraie polyvalence et d’en faire une pièce portable dans un climat plus tempéré, même autour des 10 à 15 degrés.
Finitions et fonctionnalités
Capuche
La capuche est large et profonde: heureusement sa profondeur est ajustable, mais elle reste deux fois plus large que ma tête. Lors de grands froids, il est donc préférable de porter un bonnet en dessous.
Deuxième problème occasionné par la largeur : la capuche peut partir assez facilement en arrière s’il y a beaucoup de vent.
Elle est là encore intégralement doublée en peau de mouton islandais.
Les zip
Rien à dire sur la qualité des zips, aussi bien sur les poches internes qu’externes. Ce qui est très déstabilisant en revanche, c’est qu’ils s’ouvrent de bas en haut.
Ce n’est pas forcément pratique, surtout quand on a un smartphone grand format dans la poche intérieure (type Galaxy Note), et encore plus quand on ouvre la poche un peu à l’arrache avec des gants (car il fait -15 avec du vent).
Bref, c’est une logique un peu différente et un coup de main à prendre, mais qui n’est pas forcément évident pour les gens désordonnés comme moi, encore plus dans des conditions de froid polaire.
Empiècements
Le manteau est livré avec deux parties détachables : un col détachable doublé en peau de mouton et qui se remonte pour coller au visage (en fixant le tout avec des lanières en cuir).
On trouve aussi une bande détachable, qui se fixe sur les côtés de la capuche. Elle permet non seulement à celle-ci de ne pas aller en arrière, mais assure aussi une fonction coupe vent bien utile.
Bref, tout est assez logique à ce niveau avec une couche pour conserver la chaleur, et une couche coupe-vent.
La chaleur est d’ailleurs tellement bien conservée que, si vous portez des lunettes, vous aurez rapidement de la buée dessus en respirant.
Finitions diverses (lanières etc)
Petit hic sur le col détachable: il se referme à l’aide d’une lanière et d’une boucle en cuir.
La lanière à trous se fixe sur un rivet en laiton: ce n’est pas le plus pratique à fermer avec des gants mais ça se fait. En revanche, ça s’ouvrait relativement souvent (surtout que je portais une grosse écharpe en dessous, ce qui provoquait du coup une certaine pression dessus).
La fermeture du bas est plus problématique à utiliser (quasi impossible avec des gants): il s’agit d’une boucle en cuir à attacher autour d’un bouton.
Bref, dommage que le haut se détache souvent, et que le bas ne soit pas évident à mettre. Mais ce qui est remarquable, c’est qu’une fois que tout est fermé pas une once d’air ne passe.
La fermeture frontale
Côté tailoring oblige, la fermeture frontale n’est pas une fermeture zippée mais boutonnée avec des boutons en corne, au sourcing ultra méticuleux.
Sizing
Ce modèle n’étant pas disponible en XS, j’ai dû opter pour du S. Ce n’est pas gênant dans un contexte purement utilitaire du fait d’une sacrée superposition des couches. En revanche, le manteau est assez polyvalent pour se porter comme un pardessus de ville, avec un costume mais malheureusement le fit ne le permet pas vraiment ici.
Test de la jupe thermique Norwegian Rain
En faisant part à l’équipe du magasin parisien de ma préparation pour l’Arctique, ceux-ci m’ont tout de suite conseillé une pièce à laquelle je ne m’attendais pas: une jupe thermique. Son rôle est simple : garder la chaleur et protéger des éléments.
Avec le pantalon de ski en tissu Loro Piana Storm System et les bottes Heschung j’étais déjà bien équipé donc je ne m’attendais pas à ce que ça change grand chose en termes de chaleur.
J’ai ainsi été très surpris que ça apporte à ce point une véritable protection supplémentaire contre les éléments.
Conseils de style
L’idée était de faire un shooting en Arctique et un shooting en ville. Le Moscow Coat dans cette couleur n’existant qu’en taille S (et taillant déjà assez grand), il ne convenait pas vraiment pour une silhouette urbaine. J’ai du coup opté pour un modèle un peu différent pour le shooting en ville.
Ca ne change rien pour vous si vous faites une taille moyenne ou grande.
Conclusion
Un style qui oscille entre le sartorial (grâce au rendu et au tombé des tissus) et futuristes (par certaines coupes), des finitions archi-méticuleuses et une matière technique avec des propriétés pointues. Rares sont les marques qui peuvent se vanter de cumuler autant d’avantages sur un vêtement technique. Pourtant, c’est exactement ce que propose Norwegian Rain.
La grande force de cette marque selon moi, c’est de proposer des vêtements utilitaires avec un parti pris stylistique audacieux, qui puise dans la tradition sartorial tout en optant pour des coupes qui sortent de l’ordinaire. Des vêtements techniques qui n’en n’ont pas l’apparence, un joli tour de force. Je ne m’attendais vraiment pas, par exemple à ce que le Moscow Coat puisse tenir aussi chaud, et qu’une pièce aussi travaillée sur le plan esthétique, puisse avoir sa place dans des conditions extrêmes.
Le Moscow Coat est disponible ici à 1020 euros.
Crédits:
Photos boutique et Paris: Léa Chamboncel
Photos Arctique: Anais Lamory
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