Ametora: les origines de l’Ivy Japonais (et notre prochain pop-up vintage)

Une grande partie de notre offre vintage vient du Japon. Les Japonais sont en effet devenus des fรฉrus d’Ivy League et d’Americana, en particulier ร  partir des annรฉes 70, et ont importรฉ massivement des marques preppy amรฉricaine (avant de commencer ร  en fabriquer localement), en plus du tailoring europรฉen.

Si on se doute bien que les origines de ce phรฉnomรจne remontent ร  l’occupation Amรฉricaine, les raisons exactes de cet engouement demeuraient pour moi encore assez floues. Et, vous me connaissez, je n’aime pas vraiment รชtre dans le flou.

Je me suis donc plongรฉ dans la lecture de l’ouvrage rรฉfรฉrence ร  ce sujet, Ametora (par W.David Marx), pour vous expliquer plus en dรฉtails le phรฉnomรจne.
Bien entendu, je vous invite ร  vous procurer le livre si vous souhaitez aller encore plus loin.

Je me contenterai dans cet article de couvrir uniquement la party preppy et Ivy League, sans รฉvoquer les crรฉateurs japonais post-modernes (type Yohji Yamamoto) ni le cรดtรฉ Americana workwear, le jean selvedge et les filatures de denim qui sont apparues en mรชme temps (cela fera peut-รชtre l’objet d’un prochain article).

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De l’isolement ร  l’occidentalisation

L’รจre Meiji et l’ouverture du Japon au monde extรฉrieur

L’adoption du style occidental au Japon a commencรฉ avec l’ouverture du pays au monde extรฉrieur aprรจs l’รจre Meiji.
Pendant cette pรฉriode, le Japon a adoptรฉ la technologie et le mode de vie occidentaux pour moderniser le pays. La fin de la politique de “sakoku” ou de “pays fermรฉ” a marquรฉ le dรฉbut de cette transition, avec l’arrivรฉe de la technologie occidentale et l’adoption de nouvelles pratiques รฉconomiques, juridiques, militaires et รฉducatives.

Dites-vous bien pour vous reprรฉsenter le dรฉcalage que cette politique du sakoku avait รฉtรฉ instaurรฉe en 1650 et a pris fin en 1853: il a donc fallu combler 200 ans de dรฉcalage.

La transformation sociale radicale qui a suivi a eu un impact direct sur la garde-robe masculine. Avant l’รจre Meiji, les membres de la caste des samouraรฏs de haut rang portaient leurs longs cheveux en chignons, se promenaient sur des routes de terre en robes et dรฉmontraient leur statut avec deux รฉpรฉes glissรฉes dans leurs ceintures.

Cependant, au dรฉbut du vingtiรจme siรจcle, les dirigeants du pays assistaient ร  des rรฉunions bureaucratiques, des banquets et des galas en costumes trois piรจces et en uniformes militaires napolรฉoniens. Ces tenues occidentales sont devenues synonyme de prestige.

L’influence de l’occupation amรฉricaine aprรจs la Seconde Guerre mondiale

L’engouement des Japonais pour l’Americana et l’Ivy League peut รชtre attribuรฉ ร  plusieurs facteurs. Tout d’abord, l’occupation amรฉricaine aprรจs la Seconde Guerre mondiale a introduit la culture et le style de vie amรฉricains au Japon. De plus, les vรชtements amรฉricains รฉtaient considรฉrรฉs comme un signe de progrรจs culturel et รฉconomique. Par exemple, rien n’รฉtait plus rรฉel, plus amรฉricain – et plus cher – qu’une vรฉritable paire de Levi’s 501XX des annรฉes 1950 (c’est assez courant dans les pays qui sortent de la guerre de considรฉrer les importations comme refuge de valeur lorsque son propre outil industriel est complรจtement sinistrรฉ).


L’occupation amรฉricaine du Japon aprรจs la Seconde Guerre mondiale a eu un impact profond sur la sociรฉtรฉ japonaise, y compris sur la mode et le style de vie. Pendant cette pรฉriode, le Japon a รฉtรฉ exposรฉ ร  une grande variรฉtรฉ d’influences culturelles amรฉricaines, qui ont faรงonnรฉ de nombreux aspects de la vie quotidienne et ont conduit ร  une admiration croissante pour cette culture.

L’armรฉe amรฉricaine, qui รฉtait prรฉsente en grand nombre au Japon, a รฉtรฉ une source majeure d’influence. Les troupes amรฉricaines, bien nourries et imposantes, patrouillaient dans les rues, tandis que les Japonais, affamรฉs et mal entretenus, cherchaient de la nourriture sur les marchรฉs noirs. Les forces d’occupation ont pris possession de nombreux hรดtels, propriรฉtรฉs de luxe et grands magasins, qui รฉtaient interdits aux locaux. Cette prรฉsence amรฉricaine omniprรฉsente a crรฉรฉ un dรฉsรฉquilibre de pouvoir รฉvident, mais a รฉgalement suscitรฉ une fascination pour le mode de vie amรฉricain.

En outre, l’occupation a conduit ร  une adoption plus large de la culture et du style de vie amรฉricains. Les Japonais ont commencรฉ ร  apprendre l’anglais, ร  รฉcouter de la musique amรฉricaine et ร  lire des bandes dessinรฉes amรฉricaines. Les รฉmissions de radio en anglais รฉtaient particuliรจrement populaires, tout comme les chansons amรฉricaines interprรฉtรฉes en japonais. Les journaux ont commencรฉ ร  publier des bandes dessinรฉes amรฉricaines, offrant aux Japonais un aperรงu du mode de vie de la classe moyenne amรฉricaine

Le cรดtรฉ obscur de l’Ametora: le rรดle des Pan Pan Girls

Enfin, l’occupation a รฉgalement eu un impact sur la mode, au dรฉpart un peu plus sordide. Les premiรจres ร  adopter le style occidental au Japon aprรจs la guerre ont รฉtรฉ les Pan Pan Girls (un dรฉrivรฉ de pom pom girl), des prostituรฉes qui s’adressaient aux soldats amรฉricains. Elles portaient des robes amรฉricaines aux couleurs vives et des talons hauts, avec un foulard caractรฉristique nouรฉ autour du cou.

L’adoption du style Ivy au Japon: du jeune dรฉlinquant au salariรฉ modรจle

“Ametora” est un mot japonais qui est une contraction de “American Traditional”. Il est utilisรฉ pour dรฉcrire l’adoption et l’adaptation du style vestimentaire traditionnel amรฉricain par les Japonais. Ce terme englobe une variรฉtรฉ de styles, y compris le style Ivy League, le style preppy, et d’autres styles classiques amรฉricains: on entre ici dans le vif du sujet et l’acceptation de ce style dans les moeurs.

IVY LEAGUE: le style des delinquants

Dans les annรฉes 1960, le style preppy, inspirรฉ de la mode Ivy League, a รฉtรฉ adoptรฉ par les jeunes Japonais. Cependant, ce style vestimentaire a รฉtรฉ associรฉ ร  un comportement criminel, ce qui a conduit ร  des arrestations massives dans les rues de Ginza. Les chemises ร  col boutonnรฉ, caractรฉristiques des รฉtudiants de bonne famille amรฉricain, รฉtaient liรฉes ร  la dรฉlinquance au Japon.

On a notamment chercher ร  cacher ces jeunes avant les Jeux Olympiques de 1964: le mot d’ordre avant l’ouverture รฉtait d’enfermer tous les jeunes avec chemises ร  col boutonnรฉ et cheveux gominรฉs (imaginez aujourd’hui si c’รฉtait le seul problรจme de Paris 2024).

Des marques comme VAN ont dรป beaucoup travailler pour amรฉliorer l’image de l’Ivy pour gagner l’approbation d’un grand public sceptique qui ne voulait pas se donner une mauvaise image.

Une acceptation progressive du blazer Ivy League

Avant les Jeux Olympiques de 1964, Kensuke Ishizu, fondateur de VAN , a รฉtรฉ invitรฉ par le Comitรฉ Olympique ร  concevoir l’uniforme officiel japonais. Ishizu a conรงu un uniforme audacieux et colorรฉ, qui a suscitรฉ l’indignation ds plus conservateurs de la sociรฉtรฉ japonaise.

Cependant, malgrรฉ l’opposition, l’uniforme a รฉtรฉ largement acceptรฉ par le grand public japonais qui a dans la foulรฉe รฉgalement รฉtรฉ beaucoup plus rรฉceptif aux blazers
Aprรจs la cรฉrรฉmonie d’ouverture, les acheteurs des grands magasins qui jusque lร  les refusaient en ont achetรฉ en masse. Ce pari risquรฉ et trรจs public d’Ishizu pour lรฉgitimer le blazer Ivy League avait fonctionnรฉ.

L’exemple de la chemise ร  col boutonnรฉ

Dans les annรฉes 1970, les chemises ร  cols boutonnรฉs ne reprรฉsentaient que 5 % de l’ensemble du marchรฉ de la chemise, et de nombreux grands magasins refusaient de les fabriquer en mesure. Elles รฉtaient par ailleurs interdites en entreprise.

Cependant, les adolescents contestataires des annรฉes 60 ont de plus en plus contestรฉ ces rรจgles au fur et ร  mesure qu’ils ont gravis les รฉchelons en entreprise, jusqu’ร  faire accepter les chemises col boutonnรฉ au dรฉbut des annรฉes 1980.

Le Chorei, la rรฉcitation de la devise de l’entreprise et le point sur les missions

ร€ partir des annรฉes 1980, les hommes pouvaient fiรจrement se prรฉsenter pour leurs rรฉcitations matinales du serment de l’entreprise dans des costumes Brooks Brothers ร  trois boutons et des chemises ร  cols boutonnรฉs (cela expliquera que, plus tard, des maisons japonaises comme Kamakura deviendront la rรฉfรฉrence sur ce genre de finition).

Le rรดle du licensing: l’exemple de J.PRESS et Kashiyama

Onward Kashiyama a รฉtรฉ fondรฉe en 1927 et a commencรฉ par produire des vรชtements pour hommes: elle connaรฎt une croissance significative dans les annรฉes 1960 et 1970, en important des vรชtements de marque amรฉricaine.

L’entreprise a รฉtรฉ particuliรจrement influente dans la popularisation du style Ivy League au Japon. En 1974, Onward Kashiyama a obtenu les droits exclusifs pour produire et vendre des vรชtements de J. Press au Japon. Cette dรฉcision a รฉtรฉ largement crรฉditรฉe comme รฉtant l’un des facteurs clรฉs qui ont conduit ร  l’explosion de la popularitรฉ du style Ivy League au Japon dans les annรฉes 1980

Les acteurs majeurs de l’Ametora

Kensuke Ishizu : le pรจre de l’Ivy League au Japon

Kensuke Ishizu a jouรฉ un rรดle crucial dans l’introduction du style amรฉricain au Japon. Nรฉ dans une famille aisรฉe, Ishizu a toujours eu un penchant pour la mode et le style. Il a rejetรฉ l’uniforme scolaire utilitaire et a plutรดt optรฉ pour un costume trois piรจces en tweed brun-vert, qu’il portait en toutes occasions, mรชme pendant les รฉtรฉs รฉtouffants de Tokyo.

Ishizu a commencรฉ sa carriรจre en Chine en tant que directeur des ventes d’un grand magasin, oรน il a pris en charge la fabrication et la conception de vรชtements. Lorsque la Seconde Guerre mondiale a perturbรฉ les routes de distribution en 1941, Ishizu a fait venir son tailleur d’Okayama pour continuer ร  produire des vรชtements.

Il retourne d’ailleurs ร  Okayama en mars 1932 pour se marier avec sa jeune fiancรฉe, Masako. Mรชme lors de son mariage, Ishizu n’a pas pu rรฉsister ร  l’occasion de faire รฉtalage de son flair vestimentaire : il s’est mariรฉ dans un frack ร  col haut et un ascot sur mesure.

VAN Jacket

Kensuke Ishizu fonde VAN Jacket en 1951, dans un contexte oรน le Japon se remettait encore des ravages de la Seconde Guerre mondiale et oรน l’รฉconomie commenรงait ร  peine ร  se redresser. Ishizu a vu une opportunitรฉ dans ce contexte de changement et a dรฉcidรฉ de crรฉer une entreprise qui pourrait rรฉpondre ร  la demande croissante de vรชtements occidentaux.

Cโ€™est grรขce ร  la Guerre de Corรฉe de 1954 que lโ€™รฉconomie sโ€™amรฉliore: les Etats-Unis ont besoin dโ€™un producteur ร  proximitรฉ pour soutenir lโ€™effort de guerre et le Japon devient un partenaire privilรฉgiรฉ. 75% des exportations du pays sont alors destinรฉs au conflit.
Cโ€™est une des clefs du retour en grรขce รฉconomique du Japon, avec la montรฉe en puissance dโ€™une classe moyenne de cols blancs japonais avec bien plus de moyens

Les dรฉbuts ne sont pas faciles, en particulier car , ร  part les jeunes qui ont alors peu de moyens, les hommes ne veulent pas s’habiller en prรชt-ร -porter et prรฉfรจrent la mesure (mรชme si ร  l’รฉpoque un costume vaut environ un mois de salaire).

VAN Jacket investit donc sur les jeunes de l’รฉpoque (vu comme des dรฉlinquants), qui aiment s’habiller preppy. S’il propose au dรฉpart des vestes sport, en prรชt-ร -porter donc plus accessible qu’en mesure, il รฉlargit sa gamme rapidement pour un vestiaire Ivy League complet qu’il va apprendre ร  dรฉcouvrir lors de son sรฉjour ร  Princeton.

Chemises ร  col boutonnรฉ, cravates ร  rayures portรฉes dรฉnouรฉes, vestes sport et pantalon en flanelle:ย il voit dans tout cet uniforme Ivy League un vestiaire idรฉalย que pourraient sโ€™accaparer les Japonais pour une tenue sophistiquรฉe, facile ร  porter et qui nโ€™a rien ร  envier ร  celle des Occidentaux.

En 1956, l’entreprise avait dรฉjร  grandi pour devenir une entreprise de 300 personnes rรฉparties dans deux villes.

Cependant, le vรฉritable tournant pour VAN Jacket est venu en 1962, lorsque l’entreprise a rรฉussi ร  mettre en place une ligne complรจte de vรชtements de style Ivy League. Cette ligne comprenait des pantalons chino, des blazers navy, des vestes en seersucker et des cravates repp.

Ishizu a jouรฉ un rรดle crucial dans l’introduction du style amรฉricain au Japon ร  tel point qu’on le considรจre comme le pรจre de l’Ivy League: il a รฉtรฉ l’un des premiers ร  introduire le style Ivy League au Japon, et a produire des vรชtements de ce style.

De la marque hรฉritage ร  la cash cow

Influencรฉe par leur partenaire commercial Marubeni, VAN Jacket s’est diversifiรฉe dans tous les domaines possibles pour faire grossir son CA. Au-delร  de ses deux douzaines de marques de vรชtements, l’entreprise a obtenu des licences pour des lignes รฉtrangรจres comme Spalding Golf et Gant. Elle a ouvert une boutique d’articles d’intรฉrieur, Orange House, une boutique de fleurs, Green House, et un thรฉรขtre appelรฉ VAN 99 Hall .

Avec cette diversification, le CA dรฉcolle: de 9,8 milliards de yens en 1971 (159 millions $)ร  45,2 milliards de yens en 1975 (662M$).

Cependant, cette quรชte de profit a vidรฉ la marque de tout son sens: la marque fรฉtiche que les adolescents รฉconomisaient pendant des annรฉes pour acheter รฉtait maintenant vendue ร  des mรจres de banlieue dans les supermarchรฉs ร  la recherche d’une bonne affaire sur des chaussettes.

Le stock s’accumulant, VAN a commencรฉ ร  organiser des dรฉstockages massifs, ce qui a encore dรฉvaluรฉ la marque.

A l’รฉpoque oรน des magazines comme Made in U.S.A. et Popeye promouvaient activement l’achat d’articles importรฉs authentiques plutรดt que de produits fabriquรฉs au Japon, VAN ne pouvait tout simplement pas rivaliser .

Vers 1976, la chute des ventes atteint un point de non-retour, et en 1978, la faillite รฉtait la seule option. Kensuke Ishizu s’est portรฉ volontaire pour rembourser personnellement 100 000 yens chaque mois (environ 1000โ‚ฌ par mois de nos jours avec l’inflation) jusqu’ร  ce que les dettes soient rรฉglรฉes, mais son comptable a notรฉ que cela prendrait quatre cents ans.

L’aprรจs VAN Jacket et la VAN mafia

Ishizu a non seulement lancรฉ la culture de la mode masculine japonaise, mais a รฉgalement aidรฉ ร  crรฉer l’industrie moderne de la mode masculine, en particulier aprรจs la faillite de VAN Jacket en 1978. Des anciens employรฉs ont rejoint des maisons traditionnelles pour les relancer (un peu ร  la maniรจre de la Paypal Mafia).

Parmi eux figure notamment Yoshio Sadasue, qui a ouvert sa marque, Kamakura Shirts, en 1993 pour fournir des chemises habillรฉes de bonne qualitรฉ ร  des prix raisonnables. Avec l’Ivy dans le sang, 40 % des chemises de l’entreprise sont des boutons-down, une proportion beaucoup plus รฉlevรฉe que celle de ses concurrents


Le plus cรฉlรจbre est sรปrement Tadashi Yanai, le fondateur de Fast Retailing et de UNIQLO, dont le pรจre dirigeait une franchise VAN.

changer les mentalites par les magazines

Les รฉditeurs de magazines et les illustrateurs ont jouรฉ un rรดle crucial dans l’introduction et la popularisation du style amรฉricain au Japon: il faut bien comprendre qu’avant cette pรฉriode, s’intรฉresser ร  son style รฉtait tabou pour un homme. Une tenue devait รชtre sobre et ne laisser transparaรฎtre aucun effort de bien s’habiller, qui serait vu comme de la vanitรฉ.

Parmi eux, Yoshihisa Kinameri et Jirล Ishikawa, deux รฉditeurs de magazines qui ont travaillรฉ pour Heibon Punch, un magazine populaire dans les annรฉes 1960. Cependant, aprรจs une baisse des ventes et un changement de direction รฉditoriale, ils ont quittรฉ Heibon Punch pour crรฉer leur propre magazine, Popeye.

Popeye, qui a รฉtรฉ nommรฉ d’aprรจs le personnage de dessin animรฉ populaire, a รฉtรฉ conรงu comme un magazine de mode pour les jeunes hommes. Il a prรฉsentรฉ des photographies de mode et des articles, mais son ton รฉditorial รฉtait principalement instructif, offrant des conseils pratiques et prรฉsentant les derniers styles d’Amรฉrique, de France et d’Angleterre .

Kinameri et Ishikawa ont รฉgalement travaillรฉ avec des illustrateurs pour crรฉer des images qui capturaient l’essence du style amรฉricain. Ces images, souvent prรฉsentรฉes sous forme de bandes dessinรฉes ou d’illustrations, ont jouรฉ un rรดle pรฉdagogique crucial dans la diffusion du style amรฉricain au Japon.

L’influence de Take Ivy

Un autre instrument majeur du succรจs de VAN et des autres marques preppy, c’est le recueil photographique Take Ivy de T.Kurosu et T.Hayashida paru en 1965.
Les jeunes japonais fรฉrus de style Ivy n’avaient ร  l’รฉpoque pas forcรฉment beaucoup de sources d’information sur ce style. Ce livre a donc รฉtรฉ pour eux une confirmation prรฉcieuse que les jeunes รฉtudiants amรฉricains de l’Ivy League s’habillaient bien de cette maniรจre, et que les vรชtements proposรฉs par VAN et les autres marques รฉtaient bien fidรจles au style amรฉricain.

Si le sujet vous intรฉresse, il s’agit d’un ouvrage de rรฉfรฉrence que je vous invite ร  vous procurer ici.

Conclusion

Au final, le chemin parcouru dans le style Ivy League et preppy au Japon ร  trรจs reprรฉsentatif de ce qui a permis au Japon de dรฉcoller dans les annรฉes 70: d’abord reproduire ร  la perfection, ensuite innover.

Cela fait รฉcho ร  la narration populaire autour de l’industrie รฉlectronique japonaise : Sony a suppliรฉ Bell Labs de lui accorder une licence pour les transistors pour les radios, puis a poussรฉ la technologie dans des directions inรฉdites. Toshiyuki Kurosu dรฉcrit son propre travail de maniรจre similaire : “Dans les annรฉes 1950 et 1960, nous avons simplement imitรฉ le style Ivy ร  la lettre. Nous avons essayรฉ de rester exactement en phase avec le modรจle amรฉricain. Mais je pense qu’Ivy a รฉvoluรฉ avec le temps. Ce n’est plus le modรจle qu’il รฉtait il y a soixante ans.”

Cette idรฉe de “copier pour innover” vient de la pรฉdagogie des arts traditionnels japonais. Dans l’arrangement floral et les arts martiaux, les รฉlรจves apprennent les bases en imitant le kata, une “forme” autoritaire unique. Les รฉlรจves doivent d’abord respecter ร  la lettre le kata, mais aprรจs de nombreuses annรฉes d’รฉtude, ils rompent avec la tradition et se sรฉparent pour crรฉer leur propre kata – un systรจme dรฉcrit dans le terme shu-ha-ri (“protรฉger, rompre, et sรฉparer”).

Au XXIe siรจcle, il est maintenant admis que les Japonais “sont plus fidรจles au style Amรฉricana que les Amรฉricains”. Michael Williams de “A Continuous Lean” a dรฉclarรฉ ร  ses lecteurs aprรจs un voyage ร  Tokyo en 2009 : “Je reste convaincu que la mode masculine au Japon est bien en avance sur ce que nous avons ici aux ร‰tats-Unis”. Son collรจgue, Jake Gallagher, a fait l’รฉloge de Kamakura Shirts : “La chemise OCBD est restรฉe une icรดne du style amรฉricain pendant plus d’un siรจcle, il n’est donc pas รฉtonnant que les plus beaux modรจles OCBD viennent ร  prรฉsent directement du Japon” .

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Valery

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