5 chronographes “panda” de légende : votre guide d’achat rallye 1960-75

Une Omega Speedmaster achetée 200 dollars en 1969 se négocie aujourd’hui plus de 50 000 euros. Une Heuer portée par un pilote de F1 dépasse les 20 000 euros. Comment ces chronographes de rallye ont-ils acquis un statut de légendes mécaniques convoitées par les collectionneurs du monde entier ?

1969. Une révolution silencieuse. Pendant que le monde entier a les yeux rivés sur Apollo 11, une autre histoire se joue dans l’ombre des circuits automobiles. Des chronographes « ordinaires » changent discrètement de statut. Ils deviennent des légendes.

Pourtant, tout le monde vous dira qu’une montre vintage, c’est risqué. Fragile. Obsolète face aux montres modernes. Faux. Ces chronographes de rallye des années 1960-1975 défient cette logique. Ils prouvent qu’un garde-temps peut transcender sa fonction première pour devenir un objet de fascination absolue.

Mario Andretti gagne l’Indy 500 ? Sa Yema Rallye devient mythique. Jo Siffert pilote en F1 ? Son Autavia s’arrache aux enchères. James Bond utilise une Breitling ? Elle entre au panthéon du style.

Ces montres racontent une époque révolue. Celle où porter un chronographe au poignet signifiait quelque chose. Où chaque seconde comptait. Littéralement.

Découvrons ensemble pourquoi ces garde-temps de course fascinent autant, et comment distinguer les authentiques trésors des simples copies. L’histoire commence sur les circuits, mais elle continue aujourd’hui dans votre collection.

1. Contexte historique : l’essor des chronographes “rallye”

Au tournant des années 1960, les sports automobiles – rallyes, Formule 1, endurance – connaissent un engouement mondial sans précédent. Les pilotes et leurs écuries recherchent alors des instruments de chronométrage fiables, lisibles d’un coup d’œil en pleine action.

Pilote de course avec son chronographe.

C’est dans ce contexte que les chronographes de poignet spécialisés font irruption sur les circuits. Contrairement aux anciens chronomètres de poche ou tableaux de bord, ces montres offrent aux pilotes la liberté d’avoir en permanence le temps au poignet, que ce soit pour mesurer un temps au tour aux 24 Heures du Mans ou calculer une vitesse moyenne en rallye grâce à l’échelle tachymétrique. La lisibilité devient un critère primordial : d’où l’adoption fréquente de cadrans “panda” – fond clair avec sous-cadrans noirs, ou l’inverse – qui offrent un contraste maximal semblable aux tableaux de bord des voitures de course de l’époque.

Chronographe de pilote au poignet.

Ces chronographes de rallye étaient révolutionnaires par leur combinaison de fonctionnalités et de design orienté pilote. Ils intègrent souvent un tachymètre (généralement sur la lunette ou le pourtour du cadran) permettant de convertir le temps chronométré en vitesse – pratique pour qu’un pilote ou copilote estime la vitesse moyenne entre deux points kilométriques. Par exemple, en F1, un coup d’œil rapide à la trotteuse sur l’échelle tachymétrique suffisait pour connaître la vitesse en ligne droite, tandis qu’au rallye Monte-Carlo, on pouvait évaluer son rythme sur une étape de régularité. L’autre atout de ces montres était leur robustesse : boîtiers en acier souvent étanches, mouvements éprouvés capables de résister aux vibrations des moteurs et aux chocs des pistes.

Plusieurs grandes maisons horlogères s’imposent rapidement sur ce segment. Jack Heuer, visionnaire à la tête de la maison Heuer, comprend le potentiel d’associer les montres à l’univers automobile. Heuer développe ainsi l’Autavia (contraction de Automobile et Aviation), d’abord un timer de tableau de bord devenu un chronographe de poignet en 1962, puis la Carrera en 1963, pensée pour les pilotes de la Panamericana.

Publicité vintage Heuer.

D’autres marques suivent : Omega propose des versions “Racing” de sa Speedmaster, Breitling lance la Top Time pour un public jeune épris de vitesse, tandis que des marques françaises comme Yema ou des japonais comme Seiko adaptent leurs modèles aux sports mécaniques. On assiste alors à une démocratisation du chronographe sportif. Comme le clamait Willy Breitling en 1964, « Le chronographe n’est plus uniquement l’outil du spécialiste. C’est devenu la montre de la jeunesse » – et de fait, porter l’un de ces chronos au quotidien permettait d’afficher sa passion pour la course.

Publicité vintage Breitling Top Time.

Sur les circuits, ces montres gagnent leurs galons. Des pilotes de renom en font leur compagnon indissociable, brouillant la frontière entre outil et talisman. Jo Siffert, as de la F1, ne se sépare pas de son Autavia blanche lors des Grands Prix; Mario Andretti arbore un chronographe Yema lors de sa victoire à l’Indy 500 de 1969; même James Bond, pilote amateur sur grand écran, utilise un Breitling Top Time modifié dans Thunderball (Opération Tonnerre) en 1965. Au-delà du prestige qu’elles tirent de ces associations, ces montres prouvent leur utilité : elles résistent aux contraintes extrêmes et permettent aux champions de garder un œil sur le temps avec une lisibilité inégalée. Lisibilité, robustesse, précision – telles sont les qualités qui ont fait des chronographes de rallye de 1960-75 des compagnons révolutionnaires pour les pilotes.

2. Mouvements & complications majeures

Derrière chaque chronographe d’exception se cache un moteur horloger tout aussi remarquable. Les années 60-70 voient l’apogée de calibres chronographes mécaniques aujourd’hui légendaires, dont la conception innovante a souvent été dictée par les besoins des pilotes. Nous nous intéresserons ici à quatre mouvements phares – deux suisses manuels (Valjoux 72 et Valjoux 7733), un suisse automatique (Lemania 1341) et un japonais automatique (Seiko 6138) – en soulignant pour chacun leur date d’introduction, leurs innovations techniques et leur place dans l’histoire.

Valjoux 72 & 7733 : la tradition suisse, de la roue à colonnes au levier cam

Valjoux 72 (introduit ~1946) : Ce calibre à remontage manuel à 3 compteurs incarne le chronographe classique suisse des années 60. Doté d’une architecture à roue à colonnes (une petite roue crantée bleutée bien visible dans le mécanisme) et d’un embrayage horizontal, le Valjoux 72 assure un déclenchement du chrono souple et précis.

Mouvement Valjoux 72.

Sa fréquence modérée (18’000 alternances/heure) et sa réserve de marche d’environ 48h en font un mouvement fiable et endurant. Utilisé dans de nombreux chronographes iconiques (Heuer Autavia et Carrera, Rolex Daytona réf. 6239 “Daytona Paul Newman”, etc.), il est apprécié des pilotes pour sa robustesse et sa précision. Le Valjoux 72 introduit le compteur 12 heures (au sous-cadran de 6h) en plus du 30 minutes, ce qui permet par exemple de mesurer la durée d’un relais aux 24H du Mans. À noter : l’absence de fonction “stop-seconde” (hacking) sur la plupart des Valjoux 72 de l’époque, signifiant que la trotteuse continue de tourner lors du réglage de l’heure, détail sans conséquence en course mais à avoir en tête pour la synchronisation exacte.

Valjoux 7733 (introduit 1969) : À la fin des sixties, Valjoux dévoile cette nouvelle gamme de calibres manuels (7733 à 2 compteurs, 7736 à 3 compteurs, etc.) issue de l’ébauche Venus 188. Le 7733 adopte un système à came et navette (cam switch) en lieu et place de la roue à colonnes : une solution plus simple et économique, moins onéreuse à produire et à entretenir. Concrètement, la came remplit le rôle de “chef d’orchestre” du chronographe, certes avec un déclenchement un peu moins fluide qu’une roue à colonnes, mais parfaitement fonctionnel pour un usage sportif. Le 7733 bat également à 18’000 alt/h et offre environ 45h de marche. Il se distingue par sa fiabilité et sa facilité de réglage. Beaucoup de chronos plus abordables de l’époque en sont équipés : Yema Rallye et Rallygraf, Breitling Sprint, certains Heuer Camaro, etc. C’est le mouvement du “petit peuple” des pilotes amateurs, moins prestigieux que le Valjoux 72 mais increvable. Le 7733 ne comporte pas nativement de stop-seconde non plus, et il ne prévoit pas de compteur 12h (sur la version à 2 compteurs). En revanche, sa simplicité lui confère une robustesse à toute épreuve : un atout en rallye, où l’entretien devait être minimal et le fonctionnement sans faille dans la poussière et le froid des étapes alpines.

Tissot PR 516 Chronograph des années 1970, équipé d’un mouvement Valjoux à came (7734) et affichant une échelle tachymétrique et pulsométrique combinée.
Un Tissot PR 516 Chronograph vers 1970, animé par un calibre Valjoux de la série 773x (version avec date 7734). On distingue sur la lunette tachymétrique la double graduation « Base 15 Pulsations » (rouge) et tachymètre (noire) propre à ce modèle. Crédit photo : Oreficeria Lupetta / Fratello

Lemania 1341 : l’élan de l’automatique suisse

À la fin des années 1960, la course à la première montre chronographe automatique bat son plein. Si Zenith (El Primero) et le consortium Heuer-Breitling-Hamilton (Calibre 11) revendiquent la victoire en 1969, la manufacture Lemania n’est pas en reste et propose en 1972 le calibre Lemania 1340/1341 – un mouvement de chronographe automatique intégré (roue à colonnes) qui sera adopté par Omega, Tissot et d’autres. Le Lemania 1341, dérivé du 1340, se distingue par l’ajout d’un affichage 24h au sous-cadran de 9h (indiquant l’AM/PM).

Mouvement Lemania 1341.

Techniquement avancé, il bat à 28’800 alt/h pour une meilleure précision et utilise un embrayage vertical – innovation majeure – qui élimine le saut de l’aiguille chronographe au démarrage. L’architecture intégrée (et non modulaire) assure un profil plus épais (le rotor central ajoutant de la hauteur), mais offre une robustesse exemplaire.

Le Lemania 1341 est surtout connu pour être le cœur des chronographes Omega de style “racing” du début des 70s : l’Omega Seamaster Chronograph “Soccer” et certaines Speedmaster Mark III. Tissot l’utilise également dans son Navigator et son PR 516 automatique tardif. Parmi ses atouts : la fonction stop-seconde (rare à l’époque sur les chronos auto), un remontage bidirectionnel efficace et un compteur de minutes qui avance en continu (donc plus lisible, évitant le “saut” en fin de minute). Ces subtilités techniques facilitaient la vie des chronométreurs et pilotes : par exemple, pouvoir arrêter la trotteuse et synchroniser exactement deux montres avant une course, ou lire clairement une accumulation de temps intermédiaires grâce au compteur de minutes fluide. Introduit en pleine période de transition (1972, juste avant la crise du quartz), le Lemania 1341 représente l’apogée du chronographe mécanique suisse traditionnel allié au confort du remontage automatique.

Seiko 6138 “Bullhead” : l’innovation venue du Japon

Face à la domination suisse, le Japon a réussi à tirer son épingle du jeu en proposant des chronographes automatiques performants dès 1969. Seiko, après son calibre 6139 (l’un des tout premiers chronos autos au monde), lance en 1971 le calibre Seiko 6138, évolution bi-compteur avec remontage manuel additionnel et parfois compteur 12h selon les versions. Le 6138 équipe notamment le célèbre modèle surnommé “Bullhead” (réf. 6138-0040), introduit en 1973. Son design surprenant – boîtier tonneau à couronne et poussoirs positionnés sur le haut (12h) – lui vaut ce sobriquet de “tête de taureau”. Ce choix n’est pas qu’esthétique : il permet aux pilotes de manipuler plus facilement les poussoirs du chrono, même en portant la montre sur l’intérieur du poignet (pratique adoptée par certains pour faciliter la lecture en conduisant).

Seiko 6138 Bullhead.

Le calibre 6138, à l’instar du 6139, utilise un embrayage vertical et une roue à colonnes, offrant une grande fiabilité et une activitation quasi instantanée du chronographe, sans saut initial de l’aiguille. Il bat à 21’600 alt/h et dispose du stop-seconde, une fonction que les Suisses n’introduiront généralement que bien plus tard. Sur le “Bullhead” 6138-0040, Seiko propose un cadran bi-compax avec totalisateur 30 minutes (à 12h) et 12 heures (à 6h) – fort pratique pour chronométrer des épreuves longues. Son cadran marron chocolat aux sous-compteurs crème et sa lunette tachymétrique interne inclinée confèrent une lisibilité exemplaire en plein soleil (réduction des reflets).

Mouvement Seiko 6138.

Surtout, ce chronographe fut largement utilisé en Asie et en Océanie sur les rallyes locaux, prouvant qu’une alternative non-suisse pouvait conquérir le cœur des pilotes. Le Seiko “Bullhead” demeure aujourd’hui un modèle très recherché pour son look inimitable et son mouvement innovant pour l’époque.

3. Références incontournables (1960-1975)

Voici cinq chronographes “rallye” vintage à cadran panda ou assimilé qui figurent parmi les plus emblématiques de 1960-75. Chaque modèle est présenté sous forme de fiche technique détaillée, accompagné de son contexte et de ses particularités. De l’Autavia “Jo Siffert” qui fit vibrer la F1 à la Speedmaster “Racing” rare convoitée des collectionneurs, en passant par le modèle fétiche de Mario Andretti, ces montres racontent l’histoire de la course automobile au poignet.

Heuer Autavia 2446 C “Jo Siffert”

Probablement la plus iconique des montres de pilote des sixties, l’Autavia “Jo Siffert” doit son surnom au pilote suisse Jo Siffert, qui en fit son chronographe de prédilection en F1. La référence 2446 C (boîtier compressore) présentée ici correspond aux derniers Autavia manuels produits vers 1968-69, juste avant l’ère des versions automatiques Calibre 11.

Heuer Autavia Jo Siffert.

Ce modèle se distingue par son cadran blanc à compteurs noirs (agencement “panda”) rehaussé d’aiguilles et d’accents bleus – une combinaison de couleurs reprise du sponsor Gulf et ultra-lisible. La lunette tournante tachymétrique noire permet de calculer des vitesses jusqu’à 500 km/h, idéale pour la piste. Avec son boîtier de 40 mm imposant pour l’époque et son mouvement Valjoux 72 robuste, l’Autavia Siffert symbolise la rencontre parfaite entre design fonctionnel et glamour du sport auto, d’autant que Siffert lui-même vendait ces montres dans les paddocks pour financer sa saison de course ! Un véritable bout de légende au poignet.

  • Années de production : 1968-1971 (série Autavia 2446 C, avant passage aux modèles automatiques 1163).
  • Mouvement : Calibre manuel Valjoux 72, 17 rubis, 18’000 A/h, compteur 12h. Chronographe à roue à colonnes, sans date.
  • Boîtier : Acier inoxydable Ø 40 mm, type Compressor (fond clippé étanche). Épaisseur ~14 mm. Glace plexi. Couronne non vissée à 9 mm de diamètre.
  • Cadran : Blanc mat avec trois sous-cadrans noirs (seconde continue à 9h, 30 min à 3h, 12h à 6h). Index acier appliqués avec tritium, aiguilles “bâton” luminescentes. Aiguille chrono centrale bleue (spécifique “Siffert”). Inscription “Autavia Heuer” et double marquage TSWISST à 6h.
  • Lunette & tachymètre : Lunette tournante bi-directionnelle en aluminium noir, échelle tachymétrique blanche de 60 à 500 UPH (unités par heure). Permet mesure de vitesses, ex : 1 km en 30 sec = 120 sur lunette = 120 km/h.
  • Surnom & particularités : Surnommée “Jo Siffert” car portée par le pilote Jo Siffert (F1 et Endurance) fin 60s. Cadran panda inversé inédit chez Heuer à l’époque. Montre portée par Siffert lors de courses mythiques et même aperçue au poignet de Steve McQueen en dehors des plateaux. Très recherchée des collectionneurs.

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Yema Rallygraf “Mario Andretti” (Rallye)

Publicité Yema Rallygraf.
Gros plan sur une Yema Rallye « Mario Andretti » originale de 1969. Sous la marque Yema (ou sa déclinaison Wesley’s aux États-Unis), ce chronographe à cadran inspiré du drapeau à damier présente un style « panda inversé » (fond noir, compteurs argentés) très lisible, idéal pour la course.

Le chronographe Yema Rallye (surnommé plus tard Rallygraf) est entré dans la postérité grâce à Mario Andretti, l’une des légendes du sport automobile. C’est en effet ce modèle que le champion porta lors de sa victoire à l’Indianapolis 500 de 1969. Yema, marque française audacieuse, avait conçu ce chrono en pensant aux rallyes : un boîtier compact de 39 mm pour épouser le poignet, un cadran à deux compteurs hautement contrasté rappelant un tableau de bord, et une lunette tachymétrique pour mesurer les performances. Le modèle porté par Andretti présente un cadran noir “panda inversé” (deux sous-cadrans blancs à 3h et 9h, évoquant des phares) avec un motif quadrillé subtil faisant écho au drapeau à damier. À l’intérieur, on trouve un calibre Valjoux 7730 ou 7733 fiable.

Mario Andretti avec sa Yema.

Particularité amusante : aux États-Unis, Yema a vendu ce modèle sous le nom “Wesley’s” (marque de distributeur), d’où la mention parfois de la montre d’Andretti comme la “Wesley’s Rallye”. Quoi qu’il en soit, ce chronographe respire la course : son échelle tachymétrique sur la lunette sert à calculer la vitesse moyenne sur une spéciale, et son look très “racing” en a fait un objet culte des collectionneurs de montres vintage et de fans de Mario Andretti.

  • Années de production : 1966-1970 (sous diverses appellations : Yema Rallye en France, parfois “LeJour” ou “Wesley’s” aux USA).
  • Mouvement : Calibre Valjoux 7730 puis 7733, manuel, 17 rubis, 18’000 A/h. Chronographe bi-compax (60s permanente + 30 min, pas de totalisateur d’heures). Pas de date sur ce modèle.
  • Boîtier : Acier inoxydable rond, 39 mm de diamètre, environ 13 mm d’épaisseur. Fond vissé siglé Yema. Étanchéité annoncée 50 m à l’époque. Large couronne striée non siglée. Glace plexiglas bombée.
  • Cadran : Noir mat avec deux sous-cadrans blancs à 3h et 9h (30 minutes et secondes). Index peints luminescents et repères rouge/orange aux quarts. Motif central évoquant un drapeau à damier grisé. Aiguilles droites blanches avec lume, trotteuse chrono orange vif pour la lisibilité.
  • Lunette & tachymètre : Lunette tournante noire avec échelle tachymétrique blanche (échelle 500 unités). Indications de 60 à 300 km/h. La lunette est cannelée et assez fine, ajoutant une fonction de chronomètre additionnelle pour repérer un temps écoulé.
  • Surnom & particularités : Connu comme “Andretti’s watch” car Mario Andretti l’acheta et la porta durant la saison 1969 (il aurait lui-même tenu à la conserver en souvenir de sa victoire). Parfois appelé Yema Rallygraf. Belle cote d’amour chez les collectionneurs pour une marque non-suisse, d’autant plus que chaque exemplaire a pu avoir des marquages de distribution différents. Cadran souvent restauré difficile à trouver en bon état d’origine.

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Tissot PR 516 Chronograph

Publicité Tissot PR 516.

Le Tissot PR 516, lancé initialement en 1965 en montre trois aiguilles, est emblématique par son design “racing” (le bracelet à trous inspiré des volants de course, le nom “PR” pour “Particulièrement Résistant”). En 1968, Tissot introduit la version chronographe du PR 516, transformant cette montre robuste en véritable outil de sport auto. Ce chronographe, produit jusqu’au début des années 70, existe en plusieurs configurations (deux ou trois compteurs, avec ou sans date) et illustre bien l’esthétique de transition entre les sixties et les funky seventies.

Tissot PR 516 Chronograph.

L’exemple phare est la référence à 3 compteurs de 1970 : cadran noir avec sous-compteurs blancs (panda inversé), touches de couleur vives (aiguille de chrono rouge orangé, secteur bleu sur un compteur pour le fun), le tout logé dans un boîtier coussin de 36-37 mm. On y retrouve fréquemment une échelle tachymétrique couplée à une échelle pulsométrique sur la lunette intérieure – signe que Tissot visait autant les pilotes que les sportifs en général. Côté mécanique, Tissot utilise soit le Valjoux 7733 (2 registres) soit le Valjoux 7734 (3 registres avec date) selon les versions. Montre polyvalente, moins exclusive que d’autres (Tissot était positionnée milieu de gamme), la PR 516 Chrono n’en demeure pas moins un choix raffiné pour qui cherche un look rétro automobile sans exploser son budget. D’ailleurs, elle a même fait une apparition au poignet de James Bond (Roger Moore) dans Live and Let Die (1973) dans une variante automatique PR 516 GL, preuve de son attrait “cool” de l’époque.

Détail Tissot PR 516.
  • Années de production : 1968-1974 (différentes variantes, chronographe manuel puis quelques automatiques en fin de série).
  • Mouvement : Valjoux 7733/7734 manuel (cam & navette, 17 rubis). Fréquence 18’000 A/h. Version 7734 avec date à 4h30 sur certaines références fin 60s. Pas de fonction hacking.
  • Boîtier : Acier, forme coussin ou tonneau selon les séries. Diamètre ~36 mm (sans couronne), longueur corne à corne ~43 mm. Épaisseur ~13 mm. Fond vissé siglé Tissot ou inscrit “PR 516”. Étanchéité 50 m. Glace hésalite. Boutons poussoirs ronds non protégés.
  • Cadran : Noir ou bleu selon versions, compteurs contrastés blancs (modèles “panda” inversé) ou noirs (panda classique) selon la variante. 2 compteurs (modèle à 30 min) ou 3 compteurs (30 min + 12h + petite seconde). Index métalliques appliqués avec tritium. Inscription “Tissot PR 516” souvent visible. Aiguilles larges style baton, chronographe coloré (rouge ou orange).
  • Échelles : Tachymétrique sur la lunette interne ou externe (échelle jusqu’à 400), souvent combinée à une échelle pulsométrique (base 15 pulsations) pour un usage double (sport auto et médical/athlétique). Cette double échelle est une particularité du PR 516 Chrono, rare sur les concurrents.
  • Particularités : “PR” = Particulièrement Résistant, boîtier renforcé anti-choc. Look racing affirmé (bracelet acier à trous rappelant les volants de course). Prix plus abordable à l’époque qu’une Heuer ou Omega, en faisant un choix de nombreux amateurs et semi-professionnels. A été réédité en 2024 par Tissot en version modernisée, signe de son statut culte.

La Tissot PR 516 Chronograph est souvent proposée sur Catawiki, une excellente opportunité pour acquérir ce classique du design racing.

Omega Speedmaster “Racing” 145.022-69

Publicité Omega Speedmaster Racing.

Connue surtout des collectionneurs avertis, l’Omega Speedmaster “Racing” réf. 145.022-69 est une édition rarissime de la Speedmaster professionnelle apparue en 1969. Omega, fort du succès de la Speedmaster comme montre d’astronaute (Apollo 11 a lieu en 1969), décide d’explorer un versant plus “automobile” de son chronographe phare. La version “Racing” se distingue par un cadran tout à fait unique : fond gris moyen, compteurs noirs (schéma reverse panda) avec des graduations et accents orange vif et rouges sur les index minutes et la trotteuse. Cette livrée haute en couleur visait une meilleure lisibilité en conditions de course (contraste accentué et repères plus visibles pour compter les secondes). Produite en quantités très limitées pendant environ un an, cette variante utilise le calibre Omega 861 (mouvement à remontage manuel, base Lemania cam-switch fiable) comme les Speedmaster standard de l’époque, mais se différencie uniquement par le cadran et les aiguilles sportives. Aucune mention particulière de “Racing” n’est inscrite, tout est dans le look.

Omega Speedmaster Racing dial.

Ce modèle n’ayant pas eu le succés commercial escompté en son temps (le grand public lui préférait le cadran noir “Moonwatch” classique), il est aujourd’hui l’un des plus recherchés : on estime qu’il s’en échange à peine quelques dizaines sur le marché mondial, ce qui fait exploser sa cote. Son design a inspiré plus tard Omega pour d’autres Speedmaster “Racing” (notamment des Mark II ou des rééditions modernes), mais l’original de 1969 reste un véritable graal pour collectionneur de chronos de course.

  • Années de production : 1969-1970 uniquement (produit en parallèle des Speedmaster Professional standard, très faible volume).
  • Mouvement : Omega calibre 861, chronographe manuel 12h, 17 rubis, 21’600 A/h. Pas de date. Architecture à came (Lemania 1873 base). Fiable et précis, sans stop-seconde.
  • Boîtier : Acier asymétrique “Professional” de 42 mm de diamètre (identique aux Speedmaster “Moonwatch” 145.022). Cornes lyre, protège-poussoirs. Fond vissé gravé du hippocampe Omega. Lunette tachymétrique noire fixe. Glace hésalite bombée. Étanchéité nominale 50 m.
  • Cadran : Gris anthracite, fini mat. Trois sous-cadrans noirs (petite seconde, 30 min, 12h) avec marquages blancs. Chemin de fer des minutes alternant segments orange et blancs par tranche de 5 minutes (d’où le surnom “racing dial”). Index des heures sous forme de blocs rectangulaires remplis de tritium orange. Aiguilles heures/minutes blanches larges, trotteuse chronographe orange. Inscription “Omega Speedmaster Professional” en blanc.
  • Lunette & tachymètre : Lunette noire en aluminium, tachymètre blanc gradué jusqu’à “500” (base 1000 m). Identique aux autres Speedmaster de l’époque. Permet les mêmes mesures de vitesse (ex : 1 mile en 30 sec => 120 mph).
  • Rareté & valeur : Pas de surnom officiel (on parle de “Speedmaster Racing dial”). Ultra rare car très peu produite – longtemps méconnue, sa découverte par les collectionneurs a fait grimper sa cote en flèche. Une véritable Speedmaster Racing d’origine se vend aujourd’hui plusieurs dizaines de milliers d’euros, une valorisation bien supérieure aux autres Speedmaster de série. Attention aux faux cadrans ou montages ultérieurs cherchant à imiter cette variante.

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Breitling Top Time “Zorro” (Ref. 2003)

Extrait d’un catalogue Breitling des années 1960 mettant en avant la Top Time réf. 2003 au cadran dit « Zorro ». Le design audacieux, avec ses deux larges secteurs noirs masquant partiellement les sous-cadrans, illustre la volonté de Breitling de s’adresser aux jeunes « qui veulent se démarquer ». Crédit image : Breitling via SJX

Difficile de trouver chrono plus original que la Breitling Top Time surnommée “Zorro” ! La Top Time est à l’origine une gamme lancée en 1964 par Breitling pour séduire une clientèle plus jeune, avide de liberté et de modernité. Parmi les multiples déclinaisons produites à la fin des années 60, la référence 2003 sort du lot avec son cadran blanc orné de deux grands motifs triangulaires noirs de part et d’autre – rappelant furieusement le masque du justicier Zorro. Ce design audacieux, aussi appelé “bow-tie” (nœud papillon) par certains, encadre les deux sous-compteurs (60 secondes et 30 minutes) et donne à la montre une allure inoubliable.

Breitling Top Time Zorro.

Techniquement, il s’agit d’un chronographe bi-compax classique équipé d’un calibre manuel Venus 188 (ou sa version Valjoux 7730 équivalente) à came, logé dans un boîtier en métal plaqué or de 36 mm. Contrairement aux Navitimer et Chronomat destinées aux aviateurs avec leurs règles à calcul, la Top Time fait dans la simplicité fonctionnelle : pas de télémètre complexe, juste une échelle tachymétrique (ou décimale selon les séries) sur le pourtour du cadran pour la frime utile. Popularisée à l’écran par Sean Connery (James Bond utilise une Top Time modifiée dans Thunderball), la Top Time Zorro incarne l’esprit “Swinging Sixties” – un chronographe comme accessoire de style autant que comme instrument. Produite en petites quantités (surtout en version plaquée or), elle est aujourd’hui recherchée pour son design incomparable, d’autant que Breitling en a fait une réédition limitée en 2020, ravivant l’intérêt pour l’originale.

  • Années de production : ~1966-1970 (la réf. 2003 apparaît vers 1967, les cadrans Zorro existent aussi sur des Breitling Sprint en acier de 1967 réf. 2010).
  • Mouvement : Venus 188 (après rachat par Valjoux, devient Valjoux 7730) – chronographe manuel 30 min, 17 rubis, 18’000 A/h. Cam et navette. Pas de date. Fiable et facile à entretenir, fréquence standard.
  • Boîtier : Plaqué or 20 microns (pour la réf. 2003 la plus courante) ou acier (plus rare, souvent dénommé Sprint réf. 2010). Diamètre 36 mm, épaisseur ~12,5 mm. Fond clippé acier. Glace plexi plate. Étanchéité minimale (éclaboussures). Deux poussoirs ronds lisses de part et d’autre d’une couronne non siglée.
  • Cadran : Blanc laqué avec deux grands secteurs noirs en forme de masque couvrant partiellement le côté des sous-cadrans (d’où “Zorro”). Sous-cadran petite seconde à 9h, totalisateur 30 minutes à 3h, avec aiguilles noires ou dorées. Index en applique dorés, logo “B” Breitling appliqué. Aiguilles dauphine dorées pour l’heure, fine aiguille chronographe centrale rouge sur certaines versions. Lume tritium aux points cardinaux.
  • Échelle : Tachymétrique imprimée en noir sur le pourtour du cadran (base 1000, échelle jusqu’à 160 unités – un peu optimiste). Certains exemplaires ont à la place une échelle décimale (compte des secondes en fractions de minute). Ces échelles sont discrètes pour ne pas surcharger un cadran déjà très graphique.
  • Surnom & culture pop : Appelée “Zorro” par les collectionneurs en raison du motif évoquant le masque. C’est un modèle Top Time réf. 2002 (cadran “panda” classique) qui a figuré dans Thunderball (1965) avec un compteur Geiger fictif – faisant envoler la cote de la Top Time à la vente aux enchères en 2013. La “Zorro” quant à elle a été source d’inspiration pour Breitling qui l’a rééditée en 2020 (série limitée). Authentique témoignage des sixties, c’est une montre funky, conversation piece assurée au poignet, tout en restant un véritable chronographe vintage.

La Breitling Top Time est disponible ici sur Catawiki (de belles opportunités pour trouver un modèle Zorro ou d’autres variantes iconiques).

4. Tableau comparatif des modèles

Modèle (Référence)PériodeMouvementDiamètreType de cadranÉchelle tachymétriqueParticularités notables
Heuer Autavia 2446 C
“Jo Siffert”
1968-71Valjoux 72
(manuel, 3 registres)
40 mmPanda (fond blanc, 3 compteurs noirs)
Aiguilles bleues
Lunette externe tournante
Échelle 60-500
Surnom Jo Siffert (F1)
Boîtier Compressor
Yema Rallye
“Mario Andretti”
1966-70Valjoux 7730/33
(manuel, 2 registres)
39 mmPanda inversé (fond noir, 2 compteurs blancs)
Drapeau damier
Lunette externe tournante
Échelle ~60-300
Montre de l’Indy500 1969
Marquage US “Wesley’s”
Tissot PR 516
Chronograph
1968-74Valjoux 7733/34
(manuel, 2-3 registres)
36-37 mmPanda inversé (certains gris/noir)
Index et aiguilles colorés
Lunette interne (souvent fixe)
Tachy + pulsomètre
Bracelet “trous de volant”
Vu dans James Bond 1973
Omega Speedmaster
145.022-69 “Racing”
1969-70Omega 861
(manuel, 3 registres)
42 mmRacing (fond gris, compteurs noirs, accents orange)Lunette externe fixe
Échelle 60-500
Très rare (quelques centaines ex.)
Cadran unique Omega
Breitling Top Time
Ref. 2003 “Zorro”
1967-69Venus 188 (7730)
(manuel, 2 registres)
36 mm“Zorro” (fond blanc, masques noirs)Cadran imprimé (base 1000)
ou échelle de 60 sec. décimale
Design audacieux
Réédition moderne 2020

Ce tableau récapitule les caractéristiques clés des cinq modèles présentés. On constate que, malgré leur ADN commun de chronographes de course, chaque montre possède sa propre personnalité technique et esthétique. L’Autavia et la Speedmaster se distinguent par leur grand boîtier et leur lunette tachymétrique proéminente, quand la Yema et la Breitling jouent sur des codes visuels originaux (drapeau à damier, masque Zorro). Tissot offre un format un peu plus petit mais riche en indications. Côté mouvements, tous sont manuels sauf l’Omega qui aurait pu être la seule à accueillir un mouvement automatique (Omega ayant des calibres autos en 69, mais la Speed “Racing” est restée manuelle 861). Enfin, tous ces modèles intègrent bien entendu une échelle tachymétrique, indispensable aux yeux des pilotes de l’époque, qu’elle soit sur une lunette rotative polyvalente (Autavia, Yema) ou imprimée de façon fixe (Omega, Breitling). Ce panorama permet de guider l’amateur selon ses préférences : préférez-vous la montre d’un champion (Siffert, Andretti), un style extraverti (Zorro, cadran orange) ou la sobriété efficace (Tissot) ? Le choix dépendra aussi de la disponibilité et du budget, comme nous allons le voir.

5. Évolution des prix sur le marché secondaire (2025)

L’attrait pour ces chronographes vintage n’a cessé de croître au cours des deux dernières décennies. Portées par la mode du vintage et le regain d’intérêt pour le sport automobile classique, les cotes de ces montres ont connu des hausses significatives, surtout pour les modèles liés à des figures mythiques ou produits en petite quantité. Le marché 2025 les valorise comme des pièces de collection à part entière, avec des prix variant fortement selon l’état de conservation : une montre “dans son jus” ayant vécu sur les circuits ne vaudra pas autant qu’un exemplaire en état excellent, et un exemplaire New Old Stock (NOS) avec sa boîte d’origine atteindra des sommets. Le tableau ci-dessous donne un ordre de grandeur des fourchettes de prix observées en 2025, en euros et dollars US, pour chacun de nos cinq modèles références, selon trois états :

  • État “porté” : fonctionnement ok mais usure marquée, boîtier poli ou rayé, cadran éventuellement patiné/défraîchi, pièces éventuellement remplacées. Bref, une montre qui a servi.
  • Excellent état : très bien conservée, tout original, quelques légères marques d’usage mais généralement non polie ou très peu. Cadran et aiguilles d’origine en bel état, mouvement révisé.
  • NOS (New Old Stock) : état neuf d’époque, jamais (ou quasi jamais) portée, parfois avec étiquette d’origine. Extrêmement rare pour des montres de 50-60 ans d’âge.
ModèleÉtat “porté”
(env.)
ExcellentNOS
Heuer Autavia 2446 C “Jo Siffert”≈ 8 000 € / 9 000 $≈ 12 000 € / 13 000 $≈ 20 000 € / 22 000 $
Yema Rallye “Andretti”≈ 1 200 € / 1 300 $≈ 2 500 € / 2 700 $≈ 3 500 € / 3 800 $
Tissot PR 516 Chrono≈ 1 000 € / 1 100 $≈ 2 000 € / 2 200 $≈ 3 500 € / 3 800 $
Omega Speedmaster “Racing”≈ 25 000 € / 28 000 $≈ 50 000 € / 55 000 $≈ 75 000 € / 82 000 $
Breitling Top Time “Zorro”≈ 2 000 € / 2 200 $≈ 3 500 € / 3 800 $≈ 5 000 € / 5 500 $

Ces estimations reflètent les tendances constatées en ventes aux enchères et entre collectionneurs en 2024-2025. On remarque l’envolée spectaculaire de la Speedmaster “Racing” – véritable étoile rare dont la cote s’est alignée sur sa rareté (un exemplaire en bel état a atteint 72’500 CHF aux enchères) – ainsi que la solide progression de l’Autavia Siffert, dont la valeur a sensiblement augmenté avec la réhabilitation de la marque Heuer et les histoires passionnantes liées à Jo Siffert. À l’opposé, des montres comme la Tissot ou la Yema restent relativement accessibles, même si leurs prix ont doublé en dix ans du fait de l’intérêt général pour les chronos vintage abordables. La Breitling Top Time “Zorro”, longtemps sous-estimée, profite de la tendance des cadrans exotiques et de la visibilité donnée par la réédition moderne – son prix en excellent état est ainsi passé d’environ 2 500 € en 2018 à 3 500 € ou plus en 2025. Globalement, ces montres constituent aujourd’hui des investissements “plaisir” : leur cote est soutenue par un intérêt international (Europe, USA, Asie) et la multiplication des blogs, livres et événements autour du patrimoine des sports mécaniques. Néanmoins, le marché reste sensible à l’authenticité : un exemplaire modifié ou douteux vaudra beaucoup moins, quelle que soit la tendance générale.

6. Conseils d’achat pour les chronographes de rallye vintage

Acquérir l’une de ces montres de légende demande à la fois passion et prudence. Voici une checklist d’authentification et de contrôle, présentée sous forme de tableau, afin d’évaluer minutieusement une montre avant achat. Chaque point doit être examiné de près, car les “pièges” ne manquent pas sur le marché des vintage : entre les pièces de service non conformes, les restaurations malhabiles ou les contrefaçons partielles, mieux vaut être averti pour éviter les déconvenues.

Élément à vérifierPoints de contrôle et conseils
Cadran & marquagesVérifier que le cadran est bien d’époque et non refait (redial). Les inscriptions (logo, texte, graduation tachy) doivent correspondre au modèle et à la période. Par exemple, un logo Heuer vintage diffère du logo TAG Heuer moderne, un cadran Yema original aura un certain style de typographie. La patine du tritium (index et plots lumineux jaunis uniformément) est un bon signe d’authenticité. Un cadran trop neuf ou aux couleurs anormalement vives sur une montre censée avoir 50 ans peut cacher une restauration. Privilégier les cadrans “dans leur jus” même avec quelques défauts plutôt qu’un neuf qui serait faux.
AiguillesLes aiguilles de service (changées lors d’une révision ultérieure) sont courantes et peuvent diminuer la valeur. S’assurer que la forme et la longueur correspondent au modèle : ex. l’Autavia Siffert doit avoir ses aiguilles bleues spécifiques, une Speedmaster Racing ses aiguilles oranges d’origine. Des aiguilles trop neuves (luminova au lieu de tritium) ou différentes (forme incorrecte) indiquent un remplacement. Ce n’est pas toujours rédhibitoire pour porter, mais pour collectionner il est préférable de chercher un exemplaire avec aiguilles d’origine ou de pouvoir trouver les bonnes aiguilles vintage pour les remonter.
Lunette/InsertLa lunette tachymétrique est une pièce souvent endommagée ou perdue, et donc parfois remplacée. Or, une lunette non conforme fait perdre du charme et de la valeur. Contrôler l’échelle : sur l’Autavia, la lunette tachy doit comporter les bonnes graduations jusqu’à 500 et le marquage “TACHYMETRE”. Idem pour la Speedmaster : une lunette de service moderne (dorées différentes, police contemporaine) sur une 1969 est à proscrire. Certaines Breitling Top Time ont pu recevoir des lunettes différentes (ex. lunette décimale au lieu de tachy) – bien vérifier la configuration d’origine du modèle convoité.
Mouvement & calibreOuvrir la montre (ou demander une photo du mouvement) est essentiel. Le calibre doit correspondre exactement : numéro de calibre, aspect général. Par exemple, un Valjoux 72 a sa roue à colonnes visible et doit porter le marquage “Valjoux 72” ou l’inscription de la marque (Heuer, Rolex…). Si vous trouvez un Valjoux 92 (2 compteurs) dans une Autavia 3 compteurs, il y a un souci ! De même, un mouvement propre, sans corrosion, est signe que la montre a été bien entretenue. N’hésitez pas à faire vérifier le mouvement par un horloger avant l’achat.
Numéros & référencesLa plupart de ces montres ont des numéros de série ou des références gravés (au dos du boîtier, parfois entre les cornes). Un Autavia 2446C doit porter sa référence 2446 à l’intérieur du fond et un numéro de série. Omega Speedmaster aura un numéro de série sur le mouvement correspondant à l’année 1969. Comparez ces numéros avec les bases de données ou forums : ils doivent correspondre au bon modèle et à la bonne époque. Une absence ou un limage suspect (numéro effacé) doit alerter.
Boîtier & état généralObserver la forme du boîtier : est-il polishé à l’excès ? Les arêtes doivent être présentes (surtout sur les carrures anguleuses comme la Tissot ou la Speedmaster). Un polissage trop fort arrondit les angles et fait perdre de la valeur. Vérifier aussi la présence des pompes (barrettes) d’origine si possible, la couronne (Heuer et Omega ont des couronnes siglées, Yema non siglée), l’état des poussoirs. Un boîtier peut présenter des micro-rayures d’usage, c’est normal, mais pas de coups profonds ni de corrosion. L’état général doit être cohérent avec l’âge : ni trop neuf (suspect), ni trop abîmé (risque technique).
Documentation & provenanceUn plus non négligeable : si la montre vient avec sa boîte et papiers d’origine (très rare pour ces vintage), c’est un gage de valeur ajoutée. Sinon, essayer de connaître son histoire : est-ce un achat à un propriétaire unique qui la possédait depuis 40 ans ? Une montre ayant une provenance traçable inspire plus confiance qu’une trouvaille anonyme sur un site douteux. En cas de doute sur l’authenticité de tel ou tel élément, n’hésitez pas à consulter les forums spécialisés (Omega Forums, Chronoage, OnTheDash pour Heuer) : la communauté de passionnés pourra vous guider.

Pièges courants : Méfiez-vous en particulier des montres trop belles pour être vraies, vendues à bas prix. Les contrefaçons complètes de ces chronos vintage sont rares (peu rentables à fabriquer en petite série), mais les “frankenwatches” – montages composites de pièces authentiques de divers modèles – existent. Un exemple : un boîtier d’Autavia 1163 (automatique) avec un cadran “Jo Siffert” refait et un mouvement Valjoux 72, le tout vendue comme vraie 2446C – pas évident à déceler pour un novice. Autre cas, des cadrans Speedmaster “Racing” imprimés de toutes pièces pour transformer une Speedmaster banale en faux graal : l’œil expert verra la différence dans les impressions et la luminescence. Enfin, attention aux vendeurs peu scrupuleux qui qualifient de “NOS” une montre en réalité très bien restaurée : demandez toujours des photos macro, du mouvement, etc.

Où acheter en toute confiance ? Le marché de la montre vintage s’est professionnalisé. Pour dénicher ces chronos de rallye, plusieurs canaux sont recommandés :

  • Maisons d’enchères et marchands spécialisés : Idéal pour les pièces haut de gamme (Omega “Racing”, Autavia rarissimes). Phillips, Sotheby’s, Christie’s organisent des ventes régulières, tout comme des marchands comme Analog/Shift, Watchfinder ou Wind Vintage. Le prix y sera premium, mais la garantie d’authenticité est au rendez-vous.
  • Plateformes de confiance : Chrono24 permet de toucher un large marché, avec sécurisation du paiement (compte éscrow) – mais bien étudier les avis sur le vendeur. Catawiki propose des ventes aux enchères hebdomadaires avec expert qui vérifie partiellement les lots, c’est une bonne source pour Yema ou Tissot, par exemple. Les montres partent souvent à des prix de marché, avec commission raisonnable.
  • Forums et communautés : ChronoTrader (forum d’annonces spécialisé vintages), Omega Forums (section Vente), le forum francophone “Le Temps de Montres” ou “Horlogerie Suisse” (sections petites annonces) regorgent de connaisseurs proposant des montres de leur collection. Avantage : contact direct avec un passionné, souvent historique transparent et prix discutables. Inconvénient : nécessite parfois de s’inscrire et d’être réactif, les belles affaires partent vite.
  • Bourses horlogères et salons vintage : Si possible, rendez-vous aux événements comme les bourses horlogères (à Paris, Lyon, etc.) ou les salons auto-rétro (Époqu’Auto, Le Mans Classic) où des marchands proposent des montres en vitrine. Vous pourrez voir la montre en vrai, l’essayer, et négocier directement. L’atmosphère “entre passionnés” y est propice aux trouvailles, en restant prudent sur l’euphorie ambiante pour bien contrôler la montre malgré tout.

En conclusion, l’achat d’une montre de rallye vintage est une aventure excitante qui combine recherche historique, examen minutieux et parfois un brin d’intuition. Le jeu en vaut la chandelle : au poignet, ces chronographes racontent une histoire – celle des héros du volant des sixties – et confèrent à leur porteur un style indémodable fait d’élégance sportive et de panache. Armé de ce guide, vous êtes désormais paré pour identifier la perle rare, éviter les faux pas et rejoindre le cercle des heureux propriétaires d’un de ces mythiques garde-temps de rallye. Bonne chasse et que la passion l’emporte sur la ligne d’arrivée !

 

Valery

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