Vous savez ce que j’ai appris après trois ans de blogging ?
II ne faut jamais rester sur ses a priori, en particulier sur une marque.
En effet, il ne leur suffit parfois que d’une saison pour se métamorphoser de manière surprenante.
J’ai eu cette bonne surprise avec Heyraud, même si le changement a été plus long et progressif que ça.
Vous allez voir dans cet article en quoi il est intéressant de surveiller ce genre de marque, en particulier au niveau du rapport qualité/prix.
Sommaire
I HEYRAUD, UNE HISTOIRE RICHE ET UN RENOUVEAU RECENT
1 Histoire
Heyraud tire ses racines de Limoge, qui regroupe une expertise énorme sur le travail du cuir en France: l’impulsion part de Alfred Heyraud, né en 1880 qui s’installe à 20 ans à Paris rue Cambon au sein de la boutique-atelier Pinet dont la clientèle parisienne et londonienne est fortunée et exigeante. Il rentre ainsi à Limoges en 1913 à 33 ans pour fonder la maison Heyraud, qui ouvre rapidement quatre ateliers à Paris puis une première usine en 1930.
Photos extraites du livre Heyraud, le livre du centenaire et publiées sur souliers.net
L’objectif est d’atteindre des grandes quantités et des prix accessibles en conservant la finition irréprochable caractéristique des ateliers, il se résume en une devise:
« La qualité d’autrefois, l’élégance d’aujourd’hui »
Cette qualité est préservée via une main d’oeuvre ultra compétente et des peaux minutieusement choisies mais commandées en masse: elles deviennent bien plus accessibles grâce à des économies d’échelle et c’est encore ce qui fait un des gros intérêts de la marque aujourd’hui.
2 Le renouveau
Ce positionnement a tout de même valu quelques déboires dans les années 80 à la marque coincée entre l’entrée de gamme et le très haut de gamme tant et si bien que l’usine française doit fermer en 1985.
C’est un rachat par le groupe Eram en 1995 puis l’injection de 20 millions d’euros en 2010 par le groupe qui permet à Heyraud de se relancer.
3 La nouvelle gamme
Ce renouveau s’est fait sentir à travers les cuirs, la patine, les formes et aussi le montage avec une généralisation du cousu Blake et Goodyear et un prix plutôt accessible, à partir de 140 euros et jusque 200.
On trouve aussi bien des formes basiques que des formes plus travaillées qui seront plus dures à porter, soyez vigilants là-dessus
Le travail des formes et des modèles s’est surtout fait grâce à la formation d’une véritable équipe créative: dans la collection femme seulement 30% des modèles étaient réalisés en interne en 2010, le chiffre est passé en 2013 à 100% selon Pascal Poulain, le directeur général. Un mouvement similaire s’est passé chez l’homme.
1) Les cuirs utilisés
C’est l’une des fortes valeurs ajoutées de Heyraud et l’un des intérêts majeurs de se tourner vers ce genre de marques bien établies: des peaux issues d’excellentes tanneries françaises (ex: tanneries du Puy), commandées dans des volumes énormes (il faut bien approvisionner les dizaines de points de vente en propre de la marque) et donc à des tarifs ultra négociés
2) La patine
Il s’agit d’une des spécialités d’Heyraud: elle est d’ailleurs faite main et sa subtilité est étonnante pour une marque dans cette gamme de prix.
3) Les formes
C’est là que le changement s’est effectué et c’est probablement ce qui enfermait Heyraud dans cette image de marque un peu vieillote: elles ont été considérablement rajeunies et sont à présent juste ce qu’il faut de racée: une identitée française un peu plus proche d’une finesse italienne que d’une rondeur britannique
II LES SPECTATOR SHOES: CONSEILS DE STYLE
1/ Histoire et récapitulatifs.
Les Spectator Shoes sont issues des Etats-Unis (d’où l’anglicisme) et se caractérisent par un contraste de couleurs: il peut s’agir aussi bien de richelieu de derbys ou de mocassins: elles étaient à la base noir et blanc ou marron et blanc cassé et ont depuis été déclinées dans des couleurs plus subtiles.
Les saddle shoes sont un type de spectator shoes particulières: gardez bien à l’esprit qu’il ne s’agit pas d’un achat basique et facile à porter. Il ne s’envisage qu’après avoir acquis les basiques (richelieu noir bout droit, derbys marrons, chukkas suédées et bottes entre autres).
Elles sont apparues pour la première fois apparues grâce à John Lobb qui avait conçu les premiers modèles pour la pratique du cricket en 1868: celles-ci étaient à l’époque toute blanches ce qui étrangement ne convenait pas à un jeu aussi salissant que le cricket.
Le chausseur a donc eut la brillante idée d’ajouter du cuir noir aux endroits qui se salissaient le plus vite: c’est comme ça que les spectator sont nées.
Habituellement portées en été, les versions vintage ont une tige perforée plus respirante (qui n’a rien à voir avec les bouts fleuris plus décoratifs qu’on trouve sur les brogues). Ce genre de chaussures ne se retrouve plus qu’en sur-mesure.
Les années folles étaient l’âge d’or des Spectator Shoes: elles étaient alors surtout portés par les musiciens (Louis Armstrong, Fred Astaire ), politiciens/monarques (Président Truman et duc de Windsor) et gangsters (Al Capone) de l’époque et étaient très assimilées au Jazz.
On ne voit pas très bien ici mais on ne connaissait pas les photos HD à l’époque d’Al Capone
J’éviterais d’en porter pour le rugby comme le fait ici le Duc de Windsor
Truman en portait dans une tenue formelle, mais c’était pus adapté à l’époque (et il était président).
Elles tombent définitivement en désuétude après la Seconde Guerre Mondiale et ont fait un bref come-back dans les années 80 avec des musiciens comme Mickael Jackson. Leur retour sur ces dernières années semble plus pérenne avec l’émergence de l’electro-swing (et de musiciens comme Parov Stelar) et l’intérêt croissant pour le dandysme et les traditions sartoriales.
2/ Des tenues formelles mais pas trop
Les spectator shoes se portent avec des pièces de caractère, soit en terme de motifs (avec de fines rayures, mais attention à ne pas aller à 100% dans le cliché du style Gangster) ou au niveau des matières (notamment de la flanelle de laine).
Elles sont évidemment à éviter dans les occasions formelles et au bureau et conviennent plutôt aux weekends aux casual Friday, au golf ou aux mariages en été.
Les spectator shoes sont à considérer comme une pièce forte, que vous devez donc porter avec une tenue simple et discrète qui mettront en valeur les chaussures.
a Une tenue Casual Friday
J’y mélange une tenue formelle classique avec un costume bleu marine en flanelle Oliver Wicks, une cravate rayée en cachemire Zampa di Gallina et une ceinture rouge Drazao (moins formelle qu’une marron et qui fait un rappel avec les chaussettes rouges).
Plusieurs détails comme la matière du costume, la texture et les motifs de la cravate et la couleur de la ceinture font de cette tenue un bon style de Casual Friday, qui reste en même temps discret et qui mets bien en valeur les Spectator shoes Heyraud.
b Une tenue week-end plus habillée
Il s’agit du même costume Oliver Wicks en flanelle de laine bleu marine, mais porté ici avec une chemise tab collar Oxence et un gilet en tweed SuitSupply. On est sur un style casual un peu plus affirmé.
III Test des saddle oxford d’Heyraud
1/ Matière
Le cuir est issu des tanneries du Puy: le grain est bien lisse et doux au touché, et on constate très peu d’irrégularité. Au vu de la forme plutôt fine, il marque peu les plis.
2/ Patine
La patine est subtile et n’en fait pas trop: elle se contente de mettre bien en valeur le bout de la chaussure (c’est le principal intérêt d’une belle patine pour moi).
3/ Les finitions
On se concentre surtout sur la qualité des matières, le contraste entre l’empeigne et la tige et la forme de qualité de la chaussure.
Les perforations sont minimalistes et de bon goût. La qualité des chaussure sur ce genre de perforations s’évalue surtout à la finesse et la précision de celles-ci. Pas grand chose à dire là-dessus: elles sont précises et proportionnées.
Je regarde en particulier la qualité des coutures du bout droit: elles sont ici régulières et bien resserrées.
On peut facilement se tromper sur la décoration: on a ici pile la bonne quantité pour ce genre de chaussures mais sans pour autant en faire trop.
Le laçage: c’est pour moi le seul point négatif de la chaussure, je le trouve beaucoup trop grossier par rapport au reste de la chaussure.
Difficile de dire pourquoi de manière exact.
Ma théorie: c’est que le rappel avec la tige est approximatif, et du coup un peu maladroit.
4/ La forme
Le travail réalisé sur la forme est là aussi assez remarquable: on trouve très rarement une telle finesse dans cette gamme de prix. On a un très bel exemple de bouts biseautés bien réalisés.
CONCLUSION
Un rapport qualité/prix très louable sur ce modèle à 240 euros qui cumule un montage Goodyear qualitatif, un cuir des tanneries du Puy et une patine maison faite main.
Ce résultat satisfaisant s’explique par un effet de volume bien exploité et un renouveau créatif remarquable sur ces dernières années.
Note formelle : 4/10 ( un peu trop affirmé pour le bureau)
Note casual : 9/10 (Parfait pour du casual très habillé, ça ne se porte pas forcément qu’avec un costume mais aussi un jean brut bien coupé ou un pantalon en flanelle, j’éviterais simplement les chinos)
Prise de risque : 5/10 (Ayez d’abord un bon vestiaire de basiques avant d’y penser).
Rapport qualité/prix : 8/10
Elles ne sont malheureusement plus disponibles à l’heure actuelle (mais seront avec un peu de chances renouvelées l’hiver prochain). mais les One Piece Stony en sont la déclinaison en wholecut. Celles-ci sont dispos ici.
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