Chez JamaisVulgaire, vous savez à quel point on aime les marques d’usine.
Il s’agit de marques avec une véritable histoire, qui sont maîtresses de leur savoir-faire, et qui sont mieux placées que quiconque pour proposer un excellent rapport qualité/prix vu qu’il n’y a aucun intermédiaire.
En termes de manteau et de pièces à manches, il y a toujours bien du savoir-faire en France, mais pas forcément en homme, ni en marque d’usine.
Je suivais pour tout vous dire depuis 2018 la marque Maison Lener, qui confectionne des manteaux depuis 1954 en France, à Hazebrouck. Elle a longtemps fabriqué pour d’autres marques, avant de lancer la marque en propre en 2008 en fabriquant exclusivement pour la femme. Le rapport qualité/prix était là, les patronages et les tissus utilisés avaient du caractère.
J’avais donc hâte que la marque se lance également pour homme en direct, et mes voeux ont été exaucés il y a à peine deux semaines avec la première collection homme.
Sommaire
I LENER-CORDIER: UN SAVOIR-FAIRE ET UNE IDENTITE QU’ON ATTENDAIT DEPUIS LONGTEMPS DANS L’HOMME
1 Historique
Maison Lener est une entreprise familiale fondée en 1954 à Hazebrouck par Marguerite Cordier Lener. Il s’agit au départ d’une usine qui fabrique pour de nombreuses marques de luxe.
Aujourd’hui encore, l’entreprise est gérée par les descendants de la fondatrice: Marine Lener, en charge de la communication, est par exemple l’arrière-petite-fille de la fondatrice, soit la 4è génération.
L’usine possède déjà trois marques en propre: Maison Lener, Chemins Blancs (une marque 100% femme de prêt à porter) et Trench&Coat (l’entrée de gamme du groupe, produite dans une unité de production en Ukraine).
Maison Lener est crée il y a 10 ans par Frédéric Lener, le père de Marine: il s’agit de la marque en propre haut-de-gamme de l’usine, qui s’appuie pour les créations sur les archives confectionnées par l’usine sur trois générations (vous verrez, ça explique la collection et les tissus très inspirés).
Particularité de la marque: toute l’équipe est situé à Hazebrouck, dans l’usine familiale, même les équipes digitales.
2 Une fabrication à la commande novatrice
En vous rendant sur le site dans la section homme, vous verrez la mention « Pré-commande » un peu partout: ce n’est pas tout à fait exact, il s’agit en fait plus de fabrication à la demande (de Made To Order/MTO pour les plus puristes d’entre vous).
En effet, ce n’est pas une offre à durée limitée, et elle ne demande pas de minimum de commande. La marque, qui possède son propre outil de production, est très flexible et peut réaliser une commande individuelle en une quinzaine de jours.
C’est grâce à ce modèle qu’on arrive à des manteaux fabriqués en France accessibles (avec de nombreuses références qui sont sous la barre des 500€), et avec un choix de tissus impressionnant.
Bureau de style
Ce n’est pas forcément le cas dans toutes les usines: Lener-Cordier dispose d’un bureau de style qui élabore le plan de collection (couleurs, types de matières utilisés, dessins des modèles etc).
Il faut au total une vingtaine de personnes et environ six mois pour créer un manteau: on imagine donc le sérieux et le volume de travail qu’il a fallut pour développer toute cette collection.
Ce travail se voit bien à travers la pertinence des modèles disponibles: c’est rare pour une marque d’usine en outerwear d’avoir des modèles si actuels et bien pensés (je n’avais pas vu ça depuis Private White VC).
Une fois ce travail de stylisme effectué, c’est au tour de la modéliste de définir les volumes, mesures et caractéristiques techniques des produits. C’est de son travail que dépend la coupe, les proportions et le tombé d’un modèle.
2 Savoir-faire et production
Vient ensuite la confection en elle-même: la community manager de Lener a pu filmer l’intégralité de la production du manteau de ce test. C’est vous dire à quel point chacun des modèles est fabriqué individuellement.
Voici les étapes de fabrication une fois la commande passée:
1 Placement
Les morceaux du patronages sont découpés dans le tissu sélectionné et avec les dimensions de la taille choisie: on réalise d’abord le placement des découpes sur un logiciel. Ce fichier de placement sera lu par la machine qui va découper le tissu.
Il contient aussi les informations pour la doublure et les fournitures
2 La découpe
Le fichier de placement est lu par la machine, qui va découper automatiquement les différents pans du manteau à partir du tissu.
3 Thermocollage et bolduc
Un thermocollant est ensuite appliqué au tissu afin de garantir au manteau un bon tombé (c’est ce qu’on va voir plus bas). On y applique ensuite un bolduc: il s’agit d’un ruban appliqué par dessus les coutures à l’intérieur du manteau pour les renforcer.
4 Montage
Les différents pans du manteau sont prêts: il faut donc à présent passer à l’assemblage, qui se fait lui à la main.
5 Les accessoires
Il s’agit notamment de la pose des boutons et de la griffe de la marque à l’arrière.
6 La presse
Une fois le manteau assemblé, la doublure cousue et les boutons posé, on réalise le repassage du manteau pour soigner sa mise en forme finale.
7 Le contrôle qualité
Un classique de toutes les usines sérieuse: étant donné que les commandes sont ici individualisées, il est ici réalisé minutieusement sur chaque modèle.
Ce n’est pas forcément le cas pour les manteaux produits en grande série, par milliers d’exemplaires, où seuls certains échantillons seront examinés.
II TEST&AVIS: MANTEAU CROISE EN PRINCE DE GALLES VECTORIEL
1 La matière
Si vous y regardez de plus près, vous verrez de subtiles variations de prix entre les différents manteaux de la gamme Vectoriel: ceux-ci s’expliquent par la matière utilisée.
Ce drap de laine épais 100% laine vierge est le plus cher de la gamme, ce qui n’est pas très étonnant au vu à la fois le confort et la qualité du visuel.
La laine vierge ?
Il s’agit pour rappel d’une laine qui provient de la première tonte des moutons, et qui possède moins de 7% d’autres fibres naturelles. La laine de la première tonte est considérée comme la plus douce: le poil devient ensuite plus grossier au fur et à mesure des tontes suivantes. Bien qu’il ait une texture très marquée, ce drap de laine est donc étonnement doux.
Un drap de laine lourd
Il s’agit ici d’un 580 gramme / mètre linéaire: on est donc dans le haut du panier pour un manteau.
Un Prince de Galles original
Si au premier abord, on pourrait croire que c’est un Prince de Galles gris classique, comme on en trouve partout ailleurs: le motif est en fait beaucoup plus travaillé à travers les lignes rouges et surtout les lignes jaune foncées et vertes (qui ne sont pas forcément faciles à discerner en photo).
Une multitude de couleurs qui donnent tout ce caractère à ce Prince de Galles mais sans en faire trop: il s’agit vraiment du type de motifs où l’on se dit au premier abord qu’elle a quelque chose de différent, sans savoir trop quoi à moins de l’analyser en détails.
En plus de tout ça, c’est aussi le mouvement et la fluidité de la matière qui m’ont plu: ce mouvement est d’ailleurs bien accentué grâce à la longueur du manteau et la fente arrière.
2 La coupe
Sur un manteau croisé Prince de Galles avec un large col tailleur, on s’attends évidemment à avoir une certaine longueur, mais sans pour autant dénaturer la silhouette. Ici, avec mon 1m73 et en taille 44 (qui n’est pas proposée sur le site mais que vous pourrez demander via le service client), le manteau s’arrête pile au dessus du genou.
La position des boutons est également un facteur clef pour un cintrage réussi, qui mette en avant la carrure sans tasser au niveau de la taille: on voit dans ce 6×2 que la rangée du milieu est parfaitement placée pour souligner harmonieusement la taille sans en faire trop, et sans me boudiner avec un costume en dessous.
Le résultat au niveau du dos est quant à lui assez exceptionnel: ça faisait très longtemps que je n’avais pas eu un manteau aussi bien coupé. Les images parlent d’elles-même: le V est quasiment parfait.
3 La construction
Le manteau est peu structuré, et c’est ce qui permet de s’exprimer dans un si joli mouvement:
– pas de padding aux épaules: on peut donc l’enfiler assez simplement même par dessus un costume structuré
– une légère cigarette: qui donne un côté habillé à l’ensemble, plus cohérent avec ce manteau croisé Prince de Galles
– une fine couche de thermocollant qui permet au manteau de bien se plaquer contre la poitrine et d’avoir un minimum de tombé
On obtient ainsi un manteau qui tombe bien, avec une belle fluidité et qui reste confortable grâce à sa structure discrète.
4 Les finitions
Les larges revers
J’ai été assez surpris car les revers semblaient de taille assez standard (voire un peu fins) sur la fiche produit:
Dans les faits, et pour ma taille, ils sont au final assez généreux avec 11cm de largeur
Des poches à rabats imposantes
A noter ici qu’il n’y a pas de continuité entre les motifs entre le manteau en lui-même et les rabats. Avec ce motif, cette discontinuité permet un effet de contraste qui fonctionne bien.
Voici les autres finitions remarquables:
Boutonnière poignet factice: vu le prix et la confection en France, c’est une finition qu’on pardonne aisément.
Une seule poche poitrine interne à droite: on aurait aimé deux poches, mais les deux poches à rabat externes compensent
Un feutre de col 78% laine vierge 22% polyamide il permet une bonne tenue du col une fois relevé
Doublure 60% acétate 40% viscose: on a vu mieux, mais encore une fois, vu le prix, la matière et la confection, on peut faire l’impasse
III CONSEILS DE STYLE
1 La tenue sartoriale
Ca pourrait quasiment être une tenue de Pitti Uomo, tant le Prince de Galles est un motif courant là-bas. Malgré toutes les couleurs différentes que comprend ce motif (rouge, jaune et vert), le rendu n’est pas trop ostentatoire et laisse de la place à d’autres pièces fortes en termes de coloris.
Je le porte donc ici avec les gants en cuir de cerf vert The Nines, et les richelieu Eugénie de chez George&Georges dont les tons violine font bien écho au bleu marine du costume, et aussi à la grenadine de soie de la cravate.
Porté ouvert, on a en plus un bel echo entre le roulé du revers du manteau, et celui du costume.
Je porte avec:
– un costume Ardillon (par Scavini)
– une chemise Hast à petits carreaux
– une cravate Gentlemenclover
– des richelieu Eugénie double boucle par George&Georges
2 La tenue casual
Le manteau est très habillé: inutile de vous dire qu’il faut donc une tenue un peu travaillée pour le porter de manière décontractée. Un simple pull col rond et une chemise seraient un peu insipide (à moins de mettre le paquet sur les textures et les motifs). Un col roulé aurait en revanche bien pu faire l’affaire.
Il y a une belle harmonie géométrique entre le col châle du cardigan en cachemire de chez Mahogany et le col tailleur croisé.
Etant donné que le haut est chargé en termes de couleur, j’ai choisi pour le bas des pièces plus sobres: un pantalon en velours côtelé Abensia et des sneakers Léo&Violette. On a en revanche une belle cohérence en terme de couleurs, et une verticalité grâce à des couleurs claires tout le long de la silhouette.
Je porte avec:
– un cardigan col châle Mahogany (test à venir)
– une chemise Hast à petits carreaux
– un pantalon habillé en velours côtelé Abensia Paris
– des sneakers Léo&Violette
CONCLUSION
Comme beaucoup de marques en propre d’usine, Maison Lener propose un excellent rapport qualité/prix, avec un véritable travail de stylisme: le manteau que j’ai choisi ferait par exemple j’en suis sûr fureur au Pitti Uomo.
L’offre est encore plus compétitive grâce à un modèle de fabrication à la demande particulièrement novateur: on arrive à un manteau fabriqué en France, dans une très belle matière avec une grosse partie des références sous la barre des 500€. C’était impensable encore l’année dernière (si l’on sort évidemment des simples cabans).
Evidemment, on aurait à redire sur quelques finitions mineures (doublure et boutonnières notamment) mais qui sont pour moi très négligeables au vu de l’offre globale proposée par Maison Lener.
Le manteau Vectoriel en Prince de Galles est disponible ici à 550€