Vous le savez, le credo de JamaisVulgaire, c’est toujours de vous expliquer dans quelles circonstances et pour quelles raisons aller chez une marque et pas chez une autre. Et malheureusement, c’est parfois compliqué à expliquer chez les tailleurs en demi-mesure où le produit est bien souvent un costume (qui sont très souvents fabriqués dans exactement les mêmes ateliers).
C’est donc une vraie bouffée d’air frais d’aller chez une maison de demi-mesure qui échappe complètement à tous ces codes, autant en terme de résultats final que de finitions: c’est ce qui s’est passé chez RIVES – Costume sur-mesure.
Disclaimer: Comme on l’a dit dans le titre RIVES est l’enseigne idéale pour aller plus loin: ça implique d’une part d’avoir déjà les bases, mais d’autre part d’avoir un budget conséquent à mettre au service de matières plus poussées et de finitions ultra soignées.
Sommaire
I RIVES: SE DIFFÉRENCIER DANS LE MONDE DU SUR MESURE
RIVES s’appelait auparavant Les Dandys et existe en fait depuis 2010: vous aviez peut être déjà vu passer le nom Les Dandys, mais sans forcément parvenir à distinguer cette marque de tous ses concurrents (et c’est encore plus le cas quand on se situe rue Pasquier, une parallèle à rue de l’Arcade où se situent tous les tailleurs).
Si le nom était très similaire à la concurrence, l’offre en revanche ne l’était pas du tout et était beaucoup plus diversifiée qu’ailleurs, avec de vraies possibilités en terme de streetwear et de casualwear. Il fallait du coup que le nom de la marque soit plus représentatif de cette identité extrêmement différente de ce qui se fait ailleurs, et c’est là que le nom RIVES est né.
A l’image de certaines créations très streetwear, le nom RIVES est ultra visible partout (sauf sur les vêtements, rassurez-vous), et en particulier sur tout ce qui est packaging, housses etc.
Tout l’univers de RIVES est en décalage complet avec ce qu’on peut croiser d’habitude chez un tailleur: ici, le chesterfield classique est plutôt remplacé par une murale imposante Albator réalisée en collaboration avec l’artiste Jisbar.
Tout est toujours de bon goût, mais on casse complètement les codes sartoriaux classiques.
L’idée est vraiment de montrer qu’on peut ici aller beaucoup plus loin, et carrément changer de registre par rapport aux tailleurs classiques. On peut par exemple opter pour du col châle, une veste sans col, des manches courtes ou 3/4, des bermudas: évidemment, je ne conseille ce genre d’originalités qu’à ceux qui maîtrisent déjà parfaitement les codes, et qui sauront utiliser à leur avantage ce genre de pièce plus originale.
Sur cette photo, quelques basiques mais aussi des pièces plus pointues comme des kimonos et des bombers longs
Tandis qu’ici on trouve des formes plus classiques, mais avec toujours des originalités sur les matières et les couleurs
Si on a voulut tester ce que la marque avait dans le ventre en terme streetwear, vous verrez aussi que les bases sont bien là sur le registre tailleur, avec des possibilités de personnalisation qui vont extrêmement loin. Beaucoup d’adeptes du style sartorial, ultra-exigeants, comme Thomas Drischel (le fondateur de Robert Kerr, dont l’attachement aux belles coupes et aux belles matières est sans limites) en ont fait leur tailleur fétiche.
La boutique RIVES est aussi à l’image de cette démarche, mais sans toutefois avoir non plus une image trop excentrique par rapport au reste du quartier:
Au niveau de la confection, les costumes sont faits au Portugal et les chaussures en Espagne. Si le rapport qualité/prix reste honorable, ce n’est ici pas le vrai point fort de la marque, qui se distingue plutôt largement par les possibilités de personnalisation des pièces.
Si vous aviez toujours rêvé d’une veste ou d’un blouson casual, avec des originalités sur le boutonnage ou les proportions, alors RIVES est très probablement le tailleur qu’il vous faut, avec une très belle valeur ajoutée en terme de conseils dans ce registre là.
Les costumes de mariage
RIVES n’a pas non plus à rougir en terme de costumes de mariage, et mets justement à profit son plus gros point fort: aller plus loin et casser les codes sans faire de fautes de goût (sûrement la plus grosse hantise des mariés). C’est sûrement l’enseigne où aller pour sortir du traditionnel costume bleu un peu texturé deux boutons .
II LA TENUE COMPLETE RIVES: UN STYLE CASUAL QUI VA PLUS LOIN
Pour pouvoir tester l’offre, j’ai eu la chance de recevoir une tenue complète de chez Rives.
1 Les sneakers
A l’image de l’offre d’ensemble, on peut à peu près tout faire en terme de sneakers, en partant d’un modèle de base (qui sont pour le coup assez nombreux).
Les modèles de prêt à porter vous donnent d’ailleurs une bonne idée des possibilités: on peut aussi bien aller dans du très Gentleman Farmer avec brogues en cuir graine et empiècement en tweed avec semelle dainite, en passant par des mocassins italiens de ville et pour finir par des double boucles patinées.
Vu que je n’avais pas encore de vraies belles sneakers, et que je voulais un modèle très différent de ce qui se fait ailleurs, c’était l’occasion parfaite+
On est totalement libres et on peut choisir ce qu’on veut comme matières sur la languette du milieu et sur les côtés. Attention toutefois à ne pas faire de mélanges trop excentriques, mais les conseillers de RIVES sont justement de très bon conseil.
L’idée était de partir d’une couleur pas forcément répandue, du coup le bordeaux et de vraiment les travailler pour tirer complètement parti des possibilités de cet atelier (qui fabrique pour des marques prestigieuses que je n’ai pas forcément le droit de citer, et avec un artisan patineur ultra réputé).
On est donc partis sur un contraste de matières rouge suédé pour la languette et un cuir pleine fleur patiné pour les côtés. Le cuir pleine fleur vient des tanneries du Puy (et ça se voit): il a du coup été patiné par un des meilleurs artisans du pays (et ça rallonge d’ailleurs le délai de fabrication d’une dizaine de jours).
Les semelles quant à elles sont des semelles Margom classiques.
Pour information, la paire est à 530 euros: la qualité est irréprochable, mais on reste loin d’une logique de rapport qualité/prix. Ce qu’on paie ici, c’est la possibilité de concevoir une paire unique, avec un nombre impressionant de variations, dans un atelier espagnol prestigieux. (et avec un artisan patineur reconnu)
A voir par contre comment la patine va supporter l’usure d’un port classique d’une paire de sneakers, forcément moins précautionneux qu’une paire de chaussures formelles classiques.
Verdict:
La paire normale sans patine est à 380 euros: même pour une paire avec cuir des tanneries du Puy, avec semelle Margom et confectionnées dans un atelier ultra qualitatif, ça reste coûteux.
Mais ce qu’on paie surtout, c’est cette possibilité de personnalisation extrême qu’on ne retrouve pas ailleurs. Forcément, quand on fabrique à l’unité, ça coûte beaucoup plus cher, et RIVES ne marge pas énormément sur ce genre de pièces.
La patine coûte quant à elle 150 euros: elle est réalisée par l’un des meilleurs artisans patineurs espagnol qui travaille avec des grands bottiers espagnols comme Andres Sendra.
Voici un exemple d’autres créations de ce patineur:
2 Chemise et bomber
Ces deux pièces ont été pensées pour se porter ensemble (ce n’est pas un raisonnement que je vous conseille d’avoir si vous démarrez votre garde-robe sinon vous allez être rapidement très limité). Et ça se voit en particulier au niveau du col de la chemise, le col officier est prévu pour s’assortir parfaitement avec, presque comme s’ils s’emboîtaient.
J’avais une petite réserve sur cet effet géométrique, qui arrondit énormément mon visage déjà bien rond, mais l’objectif était justement d’avoir un parti prit et d’accentuer encore plus cette impression (d’autant plus avec les lunettes de soleil).
Il fallait aussi insérer un peu de couleur, et en profiter pour utiliser le talent de Rives à détourner les codes: on a donc une chemise bleu ciel avec col blanc dépareillé, qui rappellent les chemises du milieu de la finance. Cette combinaison permet en plus d’avoir un trio cohérent de trois couleurs qui respect la logique des superpositions: aller du plus foncé au dessus avec le bomber, en passant par le bleu ciel et en allant au plus clair en dessous avec le col blanc.
Maintenant que la démarche globale a été explicitée, voyons les pièces dans leur détails
a Le bomber
C’est une des grosses pièces signature de RIVES: le défi ici est de réaliser un bomber d’un registre streetwear affirmé, en gardant les finitions caractéristiques du tailoring et une laine de qualité qu’on pourrait utiliser sur un très beau costume.
Les finitions
RIVES n’a pas badiné avec la qualité sur cette pièce et ça se voit dans toutes les finitions.
J’ai été en particulier impressionné de voir une fermeture zippée RIRI sur ce genre de pièces, et surtout chez un tailleur parisien. Il s’agit par contre d’une fermeture à un seul sens, celle-ci se terminant assez tôt avec un liseré plutôt large en bas.
Et c’est justement sur ce genre de proportions que RIVES innove particulièrement: la bande du bas du torse est particulièrement large, ce qui allonge la silhouette et donne un aspect plus habillé et plus formel au bomber (qu’on aurait pas eut avec une pièce ultra courte et avec bords côtes).
De la même manière, les bords manches ne sont pas non plus des bords côtes élastiques et sont plutôt allongés. La construction est aussi un poil formel avec un peu de padding au niveau des épaules et une cigarette discrète. Tout le reste est là pour laisser la matière s’exprimer.
La matière
C’est le gros point fort de ce bomber, et aussi ce qui explique son prix: je n’ai sûrement jamais vu de bleu marine aussi profond et qui prenait aussi bien la lumière.
Il s’agit d’une laine Loro Piana de Tasmanie super 150’s ultra fine et soyeuse, qui aurait très bien pu être utilisée pour un costume de mariage ou un costume de cérémonie et qui convient bien à une utilisation 4 saison grâce à un grammage de 250g au mètre. La finesse de ce super 150’s est assez incomparable, ce qui en fait par contre aussi une veste plutôt fragile.
Sa fluidité et la manière dont elle prend la lumière permettent de donner beaucoup de prestance et d’allure à la pièce en mouvement.
Ce bleu ultra profond lui donne en tout cas un côté très habillé qui fait qu’il ne convient pas trop pour un pic-nic dominical (à moins de bien maitrîser les codes et de porter une tenue ultra casual à côté) mais qu’il conviendra mieux pour les soirées un peu habillées.
Petit aparté sur la ligne Tasmanie de Loro Piana
C’est sûrement la laine légère la plus qualitative qu’on puisse trouver: elle était à l’origine uniquement produite à partir de la laine mérinos de l’île de Tasmanie. La ligne Tasmanian de Loro Piana a été crée dans les années 60 pour répondre au besoin d’une laine légère, polyvalente et qui froisse peu. Elle est produite à partir des meilleurs laines mérinos d’Australie.
La doublure
Sûrement un des gros points fortes de cette veste: RIVES travaille avec les fameuses doublures Huddersfield, des doublures très fortes, ultra colorées (on en avait déjà un peu parlé dans l’article sur Atelier Mesures). Le degré de détails sur cette doublure est assez impressionnant.
Verdict
La veste est à 880 euros, et le prix s’explique par le tissu Loro Piana choisi. A titre de comparaison, un costume réalisé dans cette matière vaut 1700 euros chez des tailleurs italiens en demi-mesure. Les finitions sont largement dignes du prix, avec en particulier le choix d’une fermeture zippée Riri, qu’il est déjà difficile de trouver chez les bonnes marques outerwear de PAP.
Attention, la doublure Huddersfield rajoute 120 euros à la veste (mais quand on voit le niveau de détails, on comprends pourquoi).
b La chemise
Les finitions
L’atelier de RIVES est assez cher, mais il s’en sort très bien en terme de finitions avec des coutures anglaises très fines aux épaules, et imitation anglaise au niveau de la taille. Les autres finitions haut de gamme sont bien là, comme le boutonnage Zampa Di Gallina. (avec quelques fils qui dépassent parfois, mais rien de grave).
Les boutonnières sont ultra propres
La couture à l’anglaise au niveau des épaules est fine et resserrée
Un bon rendu au niveau de l’emmanchure, avec coutures parfaitement alignées
Etant donné le registre casual de la chemise, on a choisit des poignets légèrement arrondis.
Il a fallut adapter les autres finitions à ce col très particulier: en particulier le boutonnage qu’on aurait pu prendre sous pattes, mais la patte aurait justement été trop large par rapport au col. On a donc opté pour une gorge invisible classique, qui convenait le mieux au caractère très minimaliste de cette chemise.
L’idée est de laisser surtout le col s’exprimer, pour ne pas que la chemise soit trop compliquée à porter tel quelle, sans le bomber par dessus.
La matière
Il s’agit ici d’un oxford premium Journey de chez Thomas Mason: on vous avait déjà un peu parlé de cette fameuse gamme infroissable qui contrairement à d’autres arrive à garder un tissu le plus naturel possible. Ici, il s’agit sûrement d’un des oxfords les plus fins qu’on ait pu voir, et aussi des plus lumineux.
C’est toute la subtilité de cet oxford qui permet justement d’obtenir ce ton particulier de bleu clair et ce contraste subtil entre le corps de la chemise et le col.
Evidemment, cette chemise se portera donc comme une chemise d’été casual chic, dans un contexte plutôt habillé, et pas comme une chemise oxford preppy dont on peut avoir l’habitude.
L’idée était aussi de trouver un tissu qui contraste un minimum avec la laine Loro Piana très formelle: l’oxford était parfait pour casser ce côté très cérémonial, et pour rendre la chemise portable même sans veste. Le touché est en tout cas assez incroyable: je ne pensais pas qu’on pouvait proposer un oxford avec une telle finesse.
Verdict
La chemise est à 250 euros: les finitions sont adaptées à une gamme de prix de 150 euros, mais c’est surtout le tissu qui gonfle la note, qui est l’un des plus coûteux de chez Thomas Mason.
Le pantalon
Si le haut et les chaussures ont été dans un registre délibérément streetwear, c’était surtout pour vous montrer toute la valeur ajoutée en terme de style et de possibilité de personnalisation de la marque.
Mais, comme je vous l’ai déjà dit plus haut, RIVES n’a pas non plus à rougir lorsqu’il s’agit d’aller dans le style sartorial pur et dur: c’est ce que j’ai voulu vous montrer avec ce pantalon.
Les finitions
Il s’agit d’un pantalon extrêmement habillé, qui contraste avec le haut en terme de finitions, mais qui s’accorde bien par contre en terme de noblesse des matières et de couleurs.
La ceinture est du coup à la fois minimaliste et très habillée: minimaliste parce qu’elle est très large et qu’elle ne comporte qu’une fermeture 4 crochets (d’où éventuellement une impression de vide), et très habillée car elle vient souligner la taille haute du pantalon et que cette même fermeture 4 crochets donne énormément de prestance.
Veillez par contre bien à fermer tous les quatre crochets pour ne pas exercer de tension inégale sur le tissu. Ca demande un petit coup de main au début mais on s’y habitue assez vite, et c’est sacrément pratique.
La matière
C’est elle qui fait tout l’intérêt du pantalon, le tissu fait ici parti de la gamme The Finest de Loro Piana et est prévue spécialement pour être portée l’été. Sa finesse lui donne une légèreté assez extraordinaire.
J’ai pu l’enfiler sur ces premiers jours de chaleur et c’est un vrai bonheur: on ne sent quasiment rien.
J’avais envisagé sinon de l’emmener avec moi au Cambodge, mais le tissu a l’air particulièrement fragile et ne supportera pas vraiment le moindre accrochage.
Verdict:
On a ici crée un pantalon avec de vraies finitions sartoriales (fermeture à crochets, pinces) et une matière très haut de gamme, dans un atelier portugais pointu. Ca a un coût non négligeable: 500 euros.
C’est en tout cas sans doute mon plus beau pantalon d’été, mais ce mélange de laine et de soie en fait aussi sans conteste mon plus fragile, à ne pas porter dans la vie de tous les jours. (et en évitant par exemple toutes les activités un peu stressantes pour le tissu, comme faire du vélo).
Conseils de style
CONCLUSION
Comme vous l’aurez lu tout au long de cet article, ce n’est pas pour son rapport qualité/prix que j’ai voulu parler de RIVES. C’est plutôt pour sa valeur ajoutée en terme de style et de personnalisation: on est à vrai dire très proche d’une prestation de relooking, avec tout ce qu’il faut à disposition pour aller très loin aussi bien sur les matières, les finitions et les structures.
RIVES est fait pour vous si:
- vous avez déjà les basiques: quelques costumes pour aller travailler, et tous les basiques en terme de vêtements casuals (chemises chambray, flanelle, oxford)
- vous voulez aller (beaucoup) plus loin et vous ne vous fermez aucune porte, que ça soit en terme de matières utilisées, de forme ou encore de structure. On vous donne quelques conseils pour être indépendant dans votre recherche de style.
- vous avez un budget solide: les possibilités sont nombreuses aussi bien en terme de finitions que de tissus, il serait du coup dommage d’être limité par son budget et de ne pas exploiter toute la valeur de la marque en termes de conseils de style
On trouve RIVES – Costume sur-mesure au 23 rue Pasquier et au deuxième étage du Printemps de l’Homme boulevard Hausmann.
Photographies par Léa Chamboncel
Ca a l’air très qualitatif. Dommage que sur leur site internet, il n’y a qu’une seule (trop petite) photo par article.
Bonjour Leopold ! Effectivement ils gagneraient à présenter plus de photos ! Cela dit si vous avez l’occasion de passer devant leur boutique, vous verrez l’effet est instantané.
Bonjour valery avec le pantalon gris et la veste bleu marine ainsi que la chemise qui figure au dessus, j’aurai mis soit des tennis blacks ou des chaussures noires.
Bonjour Jean Paul, le noir c’est très formel, or c’est une tenue casual. La couleur bordeaux est donc plus adaptée