D’abord, je tiens à m’excuser pour la dernière semaine qui a été quasiment vide (oui, pas d’articles publiés depuis le 24 février). Cela s’explique par quelques travaux freelance que j’ai dû prendre à la dernière minute et aussi par une petite grippe imprévue que j’ai choppée lundi.
Les chukkas sont ramenées d’Inde où elles furent d’abord portées par l’armée britannique au début du 20è siècle.
Elles furent longtemps assimilées aux joueurs de polo du fait de leur nom: le mot Hindi chukker correspond à un round au polo. Il paraîtrait d’ailleurs que ces bottes ont été nommées ainsi du fait de leur ressemblance avec celles que portaient vraiment les joueurs de polo, les jodhpur.
Les chukkas ont été portées pour la première fois aux Etats-Unis par le duc de Windsor en 1924, c’est un peu la première étape de leur popularisation.
Sommaire
I Chukkas et desert boots: histoire et généralités
1 Caractéristiques d’une chukka
Traditionnellement faites à partir de deux pièces de cuir suédé (avec les quartiers cousus par dessus la claque, comme pour les derbys), elles arrivent au niveau de la cheville, n’ont pas plus de deux à trois oeillets. Leur semelle est plutôt fine et est faite à partir de cuir, ou de caoutchouc (dans le cas des désert boots). Enfin, elles ne sont pas doublées.
2 Différence entre chukkas et desert boots
Elles furent aussi déclinées pour êtres portées pendant Seconde Guerre Mondiale dans le désert: ce sont les fameuses Desert Boots, qui utilisent une semelle en caoutchouc à la place d’une semelle en cuir.
Elles étaient conçues pour offrir à la fois confort et style, ce qui a fait leur popularité dans les années 40/50
3 Popularisation: la marque Clark’s et la desert boots Clark’s Original.
C’est au Myanmar que Nathan Clark remarque la déclinaison avec semelle en caoutchouc des chukkas: cela l’inspire particulièrement et il envoie quelques croquis en Grande-Bretagne: elles sont à la base censées être des bottes légères et confortables avec des semelles en caoutchouc et un cuir suédé couleur sable.
C’était un pari risqué car les tiges en cuir suédé et les semelles en caoutchouc sont des matériaux peu nobles, comparées aux chaussures ordinaires de l’époque. Une telle combinaison n’était portée que par les classes les plus pauvres.
Il fallut donc attendre 9 ans pour que les mentalités évoluent et qu’il soit envisageable de les sortir au grand public, en 1950. Ce fût un pari osé mais réussi: elles osnt aujourd’hui la version largement la plus répandue dans le monde des bottes chukkas.
La desert boots Clarks Original se porte facilement avec un jean ou un chino. Elles sont par contre très connotées étudiant et casual ce qui les réserve plutôt aux 18-30 ans. Les semelles en caoutchouc les excluent d’emblée des tenues vraiment formelles et codifiées.
La marque Clark’s a réussit à perdurer aujourd’hui grâce à une belle déclinaison de matières et de traitement du cuir: un des modèles les plus célèbres est le Beeswax où le cuir de la tige est traité avec de la cire d’abeille.
Les chukkas sont par contre bien plus polyvalentes du fait de matières utilisées plus nobles: la tige peut aller du cuir synthétique jusqu’au cuir de serpent.
4 Avertissement: le cuir suédé, en vaut-il vraiment l’investissement ?
Comme on l’a vu dans l’article sur comment reconnaître un cuir de qualité, le cuir suédé est la partie la moins noble de la chaussure. Même avec un bon entretien, la longévité d’un cuir suédé ne se comptera quasiment jamais en décennies, contrairement à un bon cuir de veau pleine fleur, à un cuir de vachette chromexcel ou à un cuir cordovan.
Des chukkas en cuir suédé ne doivent donc pas être considérées comme une paire de bottes centrales où vous investirez beaucoup: cela sera davantage une paire secondaire qui ne vaudra qu’environ 50% de ce que vous seriez prêts à mettre pour votre paire de bottes principales. (logique austère certes, mais indispensable pour une garde-robe qui privilégie la longévité au style pur et dur).
II Les différents types de desert boots / chukkas
1 Les Clarks
La solution la plus simple à porter, la moins chère et la plus négligée. Mais c’est aussi de loin la plus grossière: la forme n’est pas particulièrement fine et les semelles en caoutchouc rendent le modèle forcément beaucoup moins noble.
2 Les Opening Ceremony/Vanishing Elephant
La forme est plus fine, la couleur est plus travaillée et on a (souvent) une semelle en cuir. C’est un peu le modèle intermédiaire parfait.
On peut également inclure dans cette catégorie les modèles Vanishing Elephant/Lodger dont la semelle intérieure et la semelle intermédiaire sont en cuir et contrastent avec la semelle extérieure en caoutchouc pour donner une belle association marron clair/blanc cassé.
Des Opening Ceremony, Vanishing Elephant et Lodger (crédits photo: Opening Ceremony, Vanishing Elephant et stylesalvage )
3 Chukkas de bottiers
On arrive sur des paires d’une finesse rare, avec évidemment une semelle en cuir et du cuir suédé de grande qualité.
Voici par exemple une paire de Gaziano and Girling, pour les plus gros budgets:
Evidemment, un cuir suédé d’un tel prix durera de nombreuses années, mais c’est un investissement à ne considérer que si vous possédez déjà une paire principale en cuir de veau pleine fleur ou en shell cordovan. Le modèle est aussi décliné en cuir de veau pleine fleur avec un tannage au fût de chêne avec une très belle patine.
(crédits photo: gazianoandgirling.com
4 Les chukkas en shell cordovan (parfois sur-mesure)
On atteint là un autre degré de polyvalence: Alden propose des chukkas avec tige en cuir cordovan et Tricker’s aussi en cuir sur-mesure. Ce seront vraiment vos chaussures à tout faire pour les contextes casuals et décontractés, et aussi pour les vendredi et samedi soir (je vous mets au défi de trouver une boîte qui vous ne laisse pas rentrer avec ça aux pieds).
Par contre, la forme habituellement ronde des chukkas mariée avec le cordovan plutôt rigide et moins facile à travailler ne vous permettra jamais d’atteindre une vraie finesse, au point de pouvoir les intégrer à une tenue formelle.
Des chukkas Tricker’s faites sur commande (crédits photo: stitchedandstitched.com)
III Sélection de chukkas et desert boots
La sélection est volontairement brève et ne comporte que des marques traditionnelles. Les choix un peu plus alternatifs seront présents dans le guide des bottes (qui sort dimanche 9 Mars). Vous avez aussi déjà eut une bonne idée des choix disponibles dans la partie précédente.
Loake
Le bottier britannique propose des modèles increvables, avec une semelle dainite. C’est un peu l’entrée de gamme de ce qu’ont à offrir les bottiers du Northamptonshire:
(crédits photo: pediwear.co.uk)
Meermin
Avec un montage Goodyear fait main, Meermin propose un rapport qualité/prix difficile à battre et un cuir suédé dans une teinte plutôt originale.
Pour investir dans le cuir suédé, Meermin est une marque idéale qui vous permettra d’épargner un peu votre budget.
Crockett and Jones
(crédits photo: Bensilver)
Les modèles Brecon et Chiltern sont assurément les modèles les plus robustes fabriqués à partir de cuir de veau pleine fleur gros grain, d’une semelle Dainite en gomme et surtout d’un montage norvégien qui garantit une imperméabilité maximum.
IV Desert boots et chukkas: les tenues possibles
Vous ne pourrez la plupart du temps que faire des tenues décontractées avec des chukkas.
Cette photo, issus du lookbook de la collab’ Clarks et Ronnie Fieg illustre deux portes possibles, avec jean brut et chino un peu patiné:
Deux bons exemples pour porter des Clark’s de manière légère, avec un port à même la peau.
(source: on the fancy)
Le marron de ces chukkas est très vif et riche: il contraste parfaitement avec le vert plus pastel qui le calme. C’est un très bon exemple d’association de deux couleurs a priori vives: on calme les tons de l’une pour calmer l’autre.
(source: in the kapital)
Ici, les chukkas sont parfaitement cohérentes avec le jean brut légèrement délavé. Le bas s’accorde bien avec un haut relativement décontracté et workwear, avec veste de chasse, pull col rond et chemise oxford.
(source: putthison.com)
Voici un bon exemple d’une tenue habillée (pas ultra formelle non plus vu que le haut et le bas sont dépareillés): ici les chukkas sont beaucoup plus fines, un peu comme celles que je vous ai montré chez Gaziano and Girling: elles s’intègrent bien avec un pantalon à pinces à l’ouverture un peu réduite.
(source: The Hip Store Blog)
Red Wing fait aussi des chukkas, avec évidemment des semelles Vibram bien plus épaisses: les chukkas se portent dans ce cas là comme des boots normales, avec un jean brut et un ourlet selvedge bien mis en valeur.
Aucune idée :-(, ça devait etre une vieille collection.