Trouver les meilleurs palliatifs possibles…
C’est aussi le but de JamaisVulgaire: trouver des alternatives bon marché mais de bonne qualité pour vous permettre d’essayer un style sans vous ruiner, et investir davantage lorsque vous serez certains qu’il vous convient.
C’est le but du deuxième article de cette série sur les bottes, avec cette fois-ci un test des bottes Bexley et un article plus général sur les bottes bicolores, et à empiècements.
Vous y trouverez un bref historique des chaussures spectator (qui en sont un peu l’ancêtre), une sélection, des conseils de style et le test de la fameuse paire.
Sommaire
Aller plus loin
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I Historique de la botte bicolore
1 L’histoire royale
On a déjà évoqué les brogues dans le dernier article, et les bottes bicolores en sont en fait une suite logique.
Les brogues atteignent le sommet de leur popularité dans les années 30, grâce au Duc de Windsor, considéré comme l’homme le mieux habillé d’Europe. Il les mets en avant en tant que chaussures formelles en les portant pour jouer au golf, et en réception (ou accessoirement au rugby).
L’équivalent bicolore de la brogue, la spectator (aussi appelée co-respondent au Royaume-Uni) était portée comme chaussure casual, avec un pantalon blanc ou des flannelles de laine.
Dans les années 30, on déposait les spectator devant la porte d’une chambre d’hôtel pour indiquer qu’un adultère avait lieu (un peu un « do not disturb » de l’époque, mais en plus classe).
Evidemment, ce n’est pas très discret mais c’était complètement volontaire: à l’époque, on ne pouvait pas divorcer sans un flagrant délit d’infidélité, et ces chaussures étaient utilisées pour justement être pris sur le fait.
Le terme co-respondent désigne d’ailleurs aussi le troisième parti, médiateur (notaire/avocat) qui intervient dans la procédure de divorce. Ces chaussures noires et blancs extrêmement voyantes étaient aussi utiles pour montrer à la court qu’effectivement son porteur avait peu de limites.
Enfin, les chaussures bicolores étaient particulièrement prisées pour leur caractère ostentatoire durant la période faste des Années Folles, où l’on prenait un vrai plaisir à bien s’habiller, en mélangeant à la fois modernisme, hédonisme et dandisme.
Aujourd’hui, porter ce genre de chaussures a bien plus à voir avec le style individuel que le contexte, et elles peuvent facilement s’intégrer dans des tenues plus formelles.
On trouve enfin aussi ce travail de contraste à présent sur les balmoral, et plus récemment sur les bottes d’extérieur.
2 Chez les marques les plus prestigieuses
Crockett and Jones
Les Islay de Crockett and Jones sont un modèle mythique porté notamment dans Skyfall: si le cuir grainé est d’habitude rugueux avec un motif parfois grossier, on constate ici tout de suite que la texture est bien plus lisse que sur les cuirs grainés classique, avec un motif bien défini et extrêmement régulier. Le marron utilisé est plutôt riche et contraste parfaitement vaec la manche en cuir suédé, qui mettent bien en valeur les perforations.
Dernier détail bien pensé: les lacets cirés marrons clairs qui rajoutent une troisième couleur qui contraste parfaitement avec les deux premières.
Bref, on les apprécie beaucoup pour leurs couleurs, leur matière et un cuir d’excellente qualité.
Collab: Barbour x Joseph Cheneay x Rushton and Sons
Barbour et Joseph Cheaney sont deux figures emblématiquues du style héritage, qui cumulent plus de 200 ans d’histoire et d’artisanat britannique. Leur collaboration réunit à la fois les cuirs et les finitions de haute qualité de Cheaney, combinés pour les empiècements au savoir-faire de Barbour en matière de coton waxé (et on devine aux couleurs qu’il va parfaitement patiner). On les retiendra surtout pour ces matériaux de qualité, mais aussi pour le contraste de matière dont l’esthétique est subtile et réussie, en plus d’être facile à porter.*
Seul bémol: la collab’ date de 2013 et il vous faudra donc chiner un peu en occasion, ou espérer une nouvelle prochaine collaboration.
Grenson Fred Brogue Boots
Je vous ai déjà parlé des Fred de chez Grenson, avec leur fameux montage triple trépointe. L’e-shop Aphrodite1994 en distribuait une version apparemment limitée avec trois couleurs.
Je n’ai malheureusement pas réussi à la retrouver, mais j’ai quand même voulu vous montrer ce modèle et son dégradé de marron très réussi.
Tricker’s by Graham’s Fowler
Graham’s Fowler est une boutique new-yorkaise prestigieuse avec une sélection pointue: elle se permet même de collaborar avec Tricker’s avec notamment ce modèle de brogue boots. Le contraste de couleurs et de matières est vraiment bien pensé et change un peu de ces parties supérieures habituellement en cuir suédé.
Evidemment, les semelles sont commando (plus d’adhérence et de maintien).
Meermin
On arrive sur une paire de Balmoral bien plus habillée: il s’agit d’une paire de Meermin de la gamme de Made To Order. Elles ne sont donc malheureusement plus disponibles mais vous pouvez toujours vous inscrire à la newsletter dédiée pour inciter à une nouvelle production.
Evidemment, ces bottes se portent avec un pantalon habillé, en flannelle de laine, avec par exemple un léger motif Prince de Galles. Evitez le tweed et de la très grosse laine qui seront destinés à des bottes un peu plus bourrines que ça.
Gaziano and Girling
Gaziano and Girling, la marque des jeunes prodiges britanniques surtout réputée pour la qualité et la finesse de leur forme, propose un subtil contraste de deux cuirs grainés, où c’est surtout la taille qui joue.
Les couleurs sont aussi bien pensées: le marron clair rend la paire plus décontractée et chaleureuse tandis que le marron foncé, à la limite du bordeaux lui donne un côté plus urbain et habillé.
Pour bien mettre en valeur ce travail sur les matières et les couleurs, la paire est plutôt minimaliste sur le reste avec de simples oeillets pour le laçage et un bout chasse, pour donner un côté authentique suppémentaire. Encore une fois, la semelle est en dainite.
Cheaney Irving
Ces bottes sont une version plus accessibles des bottes Islay de Crockett and Jones. La qualité de construction reste remarquable grâce à la rigueur de Cheaney (rappelons le, l’enseigne a été reprise par les frères à la tête de Church, qui voulait continuer à faire du qualitatif après le rachat par Prada).
Le laçage reste relativement classique avec 5 oeillets et trois crochets et le contraste de couleurs est réussi entre le cuir grainé et la manche en cuir suédée.
Les perforations sont nettes et bien alignées et on a un montage Goodyear classique pour une bonne durabilité et imperméabilité (mais pas de montage Veldtschoen, dommage).
Ce sont des bottes d’hiver peut être plus adaptée étant donné qu’elles sont intégralement doublées en fourrure. Si le cuir grainé est de moins bonne qualité que celui des Islay, il reste tout de même très honorable et on remarque déjà des subtiles nuances de marron.
II Conseils de style
1 Le chasseur, la tenue Barbour
En effectuant mes recherches, je suis tombé sur l’e-shop Aphrodite1994, un e-commerce britannique assez classique avec une sélection correcte. Il a le mérite dans sa partie blog de proposer des looks plutôt intéressants et cohérents, avec de belles photographies de détails.
Il propose ainsi un look country très simple avec une Barbour, un jean brut et surtout une chemise à motifs qui réactualise un peu l’ensemble.
2 Avec du tweed
Cette tenue d’un lecteur du blog de Gentleman Gazette est plutôt formelle, avec un pardessus à revers large et en pointes qui mets bien en valeur la carrure. La laine est parfaitement choisie et sa texture rugueuse mets bien en valeur le cuir suédé plus doux et plus subtile de la partie supérieure de la chaussure. Le glaçage impeccable achève de faire du bas une combinaison brillante (au propre comme au figuré) de trois matières et trois textures, ce qui se voit particulièrement bien sur la seconde photo.
Une laine plus épaisse, à la texture plus grossière (comme du tweed) aurait par contre été trop décalée par rapport au caractère habillé de ces balmorales
3 La tenue avec la balmoral habillée
Les bottes ici sont déjà un peu moins habillées: il s’agit de derbys à bout droit, à la semelle plus épaisse (sûrement un montage Goodyear) et avec un empiècement dont la couleur évoque davantage les country boots. Un joli contraste de marron qui est bien mis en valeur par un pantalon en flannelle de laine plus casual que le précédent: il n’y a pas de plis frontal et l’ourlet est apparent. On voit bien ici qu’il s’agit d’une coupe slim bien plus décontractée.
Le haut fait parfaitement écho aux couleurs de la botte avec une veste à motif originale qui joue aussi sur le marron et un pull col rond qui s’impose surtout par sa texture.
4 Les fautes de goût
On a ici des bottes workwear (et encore, pas de la meilleure qualité au vue des semelles) portées avec un cardigan noir oversize et une superposition hasardeuse de gris. Je ne sais pas vraiment quel est l’effet recherché mais la combinaison du workwear et de ce haut un peu goth-ninja est complètement contre-nature. Le tout effectué avec des pièces apparemment cheap donne l’impression de quelqu’un qui en fait beaucoup trop et d’une tenue pas naturelle du tout.
Les bottines bicolores ci-dessous semblent plus réussies (avec un joli contraste de couleurs) : elles ne sont par contre vraiment pas mises en valeur par le jean délavé au tombé ingrat.
Ce jean est de plus en flagrant décalage avec tous les efforts faits dans le haut de la tenue, qui est pour moi bien trop chargé (surtout avec la cravate à pois et la pochette qui n’ont pas grand chose à faire là).
Les bottes portées ici sont des L.L Beans, il s’agit à la base de bottes de bûcheron avec une très très forte empreinte utilitaire. Elles peuvent se porter en ville mais forcément avec une tenue workwear. Ici, le haut type Pitti Uomo (avec les gants rentrés dans la poche poitrine) est bien plus précieux.
Toutes les bottes workwear ne s’intègrent pas forcément dans une tenue de ville, comparez par vous même ces L.L Beans avec des Wolverine 1000 miles:
III Présentation de Bexley et des bottes
1 Bexley
Bexley existe depuis 1985 et se distingue par une stratégie de vente ultra compétitive avec des prix bas et uniques (129 euros la paire de chaussures, 139 euros la paire de bottes). Elle propose la vente par lot, avec une deuxième paire au choix à 89 euros.
La marque est très présente sur Internet et a crée son site en 1996 (ou la plupart d’entre nous n’avions même pas encore de connexion chez nous): elle est restée depuis 30 ans complètement indépendante, et développe tous ses produits en interne afin de proposer les meilleurs prix et d’éliminer le plus d’intermédiaires possibles.
Particularité amusante: chacun des produits conçus est essayé par le Président, Eric Botton, avant sa commercialisation.
On va le voir, des compromis sont faits pour atteindre un prix le plus accessible possible, mais les matériaux restent toujours de bonne qualité, avec notamment du veau aniline des Tanneries d’Annonay, ou des cuirs grainés de vachette d’Amérique.
2 Test des bottes Irving
Les bottes Irving sont une botte de ville derby à bout droit avec une manchette en cuir suédé.
Pour atteindre un prix accessible (139 euros), la marque a dû faire des concessions: on a ainsi un montage Blake et pas un montage Goodyear, qui aurait apporté bien plus d’imperméabilité et une plus grande longévité. Les doubles surpiqûres entre l’empeigne et la tige garantissent sinon tout de même une confection robuste.
On a a sinon une semelle en dainite, typique de ces bottes et dont l’adhérence vous sera bien utile les jours de pluie.
La paire est intégralement doublée en cuir de vachette et reste donc plutôt confortable.
J’ai en revanche été surpris par le cuir qui est ici d’une qualité plutôt correcte, à laquelle je ne m’attendais en tout cas pas du tout pour ce prix là.
L’esthétique
Le contraste de couleurs et de matières est plutôt réussi et agréable à l’oeil. Le laçage rajoute du caractère de manière extrêmement raisonnable avec seulement 4 oeillets (renforcés) et trois crochets en laiton.
Excellente surprise: j’avais quelques préjugés à propos de la marque, notamment par rapport à la largeur de ses chaussants, réputés vieillots et patauds. Ce n’est pas du tout le cas ici et la forme est plutôt très bien proportionnée, fine avec un joli bout rond.
Un bout rond qui reste tout de même plutôt élancé.
Une ouverture à la cheville de 17 cm mets parfaitement cette paire en valeur.
Un laçage pratique et avec du caractère.
La semelle en dainite pour l’adhérence,, avec un emplacement prévu pour les fers.
En conclusion, Bexley ne prétends absolument pas proposer des bottes indestructibles, à tout épreuves, et qui vous dureront 10 ans. On a plutôt à faire à des bottes de ville (qui seront très confortables pour les petites intempéries), avec une esthétique réussie et un prix très abordable, obtenu au prix de quelques concessions comme le montage Goodyear.
Si vous n’avez pas encore ce genre de bottes, et que vous voulez vous essayer à ce style pendant plusieurs saisons avant d’investir dans une paire plus coûteuse, je vous les recommande chaudement.
Aller plus loin
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J’ai rarement vu des mecs porter des bottes
bicolores ou tricolores. C’est plus facile d’assortir des chaussures unies aux
habits.
Une fois de plus, merci à toi Valéry, en lisant
ton article et en voyant ton test et les photos, j’ai craqué pour les boots Irving
couleur chocolat (en solde à 129 euros en ce moment) que je n’aurais jamais
trouvé sur le net sans toi.
Pas grand-chose à ajouter sur ton test très complet. Je confirme que le rendu
général est valorisant, le cuir est épais et ne plisse pas trop, le grainage
est beau et la couleur intense et bien foncée.
En prime le confort est très bon, les boots se font vite au pied, la semelle est
parfaite pour ne pas glisser et procure un très bon confort.
Le seul point à surveiller, j’ai le coup de pied assez fort et les pieds raisonnablement
large et à ma pointure exacte, je trouve que ça taille un poil grand et qu’elles
sont un poil trop large. La prochaine fois, je testerai ½ pointure en dessous.
A noter que les embauchoirs taillent
grand eux aussi, je vais commander 1 taille en dessous pour les prochains.
Au final, c’est un rapport qualité prix quasi impossible à battre et les
compliments fusent car on n’en voit pas à tous les coins de rue.
100% content de mon achat.